Dans notre dernière chronique, nous avons présenté les principes sous-jacents de la surmultiplication. Nous allons maintenant approfondir le sujet en touchant aux contraintes, ainsi qu’aux deux variétés principales de système de surmultiplication utilisées sur les moteurs modernes.
Et la chaleur fut
Comme nous le savons, un moulin muni d’un système de surmultiplication n’est plus limité par la quantité d’air aspirée par la dépression créée pendant la phase d’admission. Alors que la pression créée permet de hausser de façon importante la quantité d’air admise, le fait de mettre l’air sous pression produit un effet secondaire indésirable, soit un réchauffement de la charge d’admission. Il s’agit d’un phénomène inévitable dès que l’on comprime n’importe quel gaz et plus l’air est compressé, plus il se réchauffe. Ceci est indésirable pour deux raisons principales : cela réduit la densité de la charge (la chaleur fait dilater l’air, ayant pour effet de réduire le nombre de molécules d’oxygène disponible pour la combustion) et, deuxièmement, hausse la température du moteur. Pour contrer cette tendance, on fait souvent appel à un refroidisseur intermédiaire (également connu sous le nom intercooler), un dispositif qui ressemble beaucoup à un radiateur, sauf que celui-ci sert à réduire la température de l’air propulsé sous pression plutôt que le liquide de refroidissement. Il existe plusieurs types de refroidisseur intermédiaire selon l’application désirée.
Deux options
On parvient à la surmultiplication par deux façons, soit par la suralimentation (supercharging) ou par la turbocompression. Dans les deux cas, on fait usuellement appel à une turbine révolutionnant à très haute vitesse (jusqu’à plus de 200 000 tr/min!) pour créer la pression désirée. Chacune offre un mélange d’avantages et de désavantages et le choix final repose généralement sur l’application.
La suralimentation, généralement moins bien connue, entraîne la turbine directement à partir du vilebrequin. Comme la turbine doit révolutionner beaucoup plus rapidement que ce dernier, on doit faire appel à un système d’entraînement capable de multiplier sa vitesse, chose qu’on accomplit ordinairement avec des roues dentées et courroie, ou encore par un ensemble d’engrenages. La suralimentation est relativement simple du point de vue de l’exécution et produit des moteurs qui répondent rapidement et de façon prévisible à l’accélérateur. Tout n’est pas parfait, cependant, et le coût à payer est qu’elle est très gourmande en puissance et une partie de l’énergie produite est absorbée par son fonctionnement.
Dans le cas de la turbocompression, on place une turbine dans le système d’échappement (celle-ci étant liée par un bras à une deuxième turbine dans l’admission), exploitant ainsi le déplacement des gaz pour l’entraînement. Puisqu’il s’agit de l’utilisation d’énergie « gratuite », la turbocompression se démarque de la suralimentation par son efficacité accrue. En contrepartie, la réponse du moteur est souvent moins uniforme en raison du fait qu’il faut atteindre un certain régime pour qu’une pression suffisante soit produite, chose qui occasionne parfois un petit retard communément appelé lag. Il est à noter, toutefois, que si cette lacune était perceptible et problématique dans le passé, les moteurs turbo modernes sont beaucoup plus conviviaux grâce aux avances technologiques, notamment l’utilisation de plus petites turbines (et/ou parfois plus d’une turbine). La réduction d’inertie de celles-ci permet une meilleure réponse à un tel point que les moteurs turbo modernes sont pratiquement indiscernables des moteurs atmosphériques sur ce point. Finalement, la chaleur excessive avec laquelle le turbocompresseur doit composer (le produit de l’emplacement de la turbine dans le système d’échappement) pose des défis importants en ce qui a trait à la durabilité et à la gestion de la friction. Heureusement, l’arrivée d’alliages résistants, de roulements en céramique et d’huiles plus performantes a largement réglé ces problèmes.