Le dévoilement des modèles H2 et H2R de Kawasaki l’automne dernier a effectivement reconduit le mariage entre les moteurs surmultipliés et les motos de série. Certains se souviendront qu’il ne s’agit pas de la première excursion dans le monde des moteurs non atmosphériques, le dernier rendez-vous datant du début des années 1980 avec les motos « turbo » produites par les 4 grands fabricants japonais. Alors, pourquoi un retour à la surmultiplication maintenant?
Puissance et réglementation
Les fabricants de motos se livrent bataille sur de nombreux fronts, notamment celui de la puissance et il est donc peu surprenant de voir que nous avons eu droit à une ascension importante dans la puissance des engins depuis de nombreuses années. Il est à noter que ceci fut accompli malgré un resserrement des normes de gaz d’échappement, les gains provenant à la fois d’une amélioration dans l’efficacité des moteurs ainsi que par des révolutions-moteur plus élevées (rappelons qu’un moteur à explosion est essentiellement une pompe à air et il suit que, toutes choses étant égales, un plus grand débit d’air au moteur produira plus de puissance). Toutefois, tellement évolués et raffinés sont rendus les moteurs (on parle de rendements particuliers touchant maintenant le 200 ch/L dans certains cas) que les hausses sont devenues de plus en plus difficiles à réaliser. Voilà que certains diront que la décision de se tourner à nouveau vers la suralimentation est simplement le produit de la quête à la puissance. Cependant, si cela était possiblement vrai au début des années 1980, la raison est d’autant plus complexe cette fois-ci.
Comme nous l’avons mentionné plus tôt, le cadre réglementaire visant à gérer les émanations des moteurs ne cesse de se resserrer. Toutefois, une nouvelle dimension s’est ajoutée récemment, soit celle des normes d’émanation de dioxyde de carbone (notamment en Europe), chose qui n’existait pas par le passé. Il s’agit, en effet, de la raison principale (ensemble avec le besoin de diminuer la consommation d’essence) pour laquelle le monde automobile a changé de cap, se tournant davantage vers les moteurs surmultipliés (soit turbocompressés et suralimentés) et c’est aussi pourquoi les fabricants de motos suivront le pas dans les années à venir.
Avantages de la surmultiplication
La surmultiplication, en augmentant la quantité d’air entrant dans le moteur, a pour effet de permettre à ce dernier d’agir comme s’il avait une plus grande cylindrée. Pour y arriver, on place un compresseur (généralement une turbine) dans le train d’admission, créant une mise sous pression et haussant le flux d’air allant au moteur, améliorant ainsi son rendement. Il ne s’agit pas d’une nouvelle technologie en tant que telle, le premier brevet lié à la surmultiplication datant de 1885 par le célèbre Gottlieb Daimler. Son développement partit de bon train dans les années 1920 lorsque la technologie fut adoptée par l’industrie aérienne, celle-ci cherchant à contrer l’effet de la perte de puissance en raison de l’altitude dans les moteurs des avions.
Si la capacité d’augmenter la puissance de pointe est l’atout le mieux connu de la surmultiplication, la possibilité de renforcer la puissance ailleurs dans la plage de révolution est encore plus avantageuse pour un véhicule routier. Dans l’ère moderne des ordinateurs, le mariage de la suralimentation aux systèmes numériques de gestion permet de non seulement accroître, mais également de réduire la majoration de la puissance aux régimes souhaités, ceci rendu possible par le contrôle précis de la pression de l’admission (ainsi que les autres paramètres de l’alimentation et de l’allumage). En d’autres mots, il est possible de nous donner la puissance uniquement quand nous en avons réellement besoin et de couper la consommation d’essence et les émanations le restant du temps, chose qui est pratiquement impossible (ou du moins nettement plus difficile) à accomplir avec un moteur « atmosphérique ». Parlons du beurre et de l’argent du beurre.