Yamaha XV1900, un nouveau chopper convivial

Par Michel GarneauPublié le

Ceux qui s’intéressent à l’histoire ou à la culture générale savent probablement qu’« Eurêka », une exclamation qui désigne habituellement le triomphe face à une découverte, est censée avoir été utilisée pour la première fois par Archimède en découvrant la pureté de l’or dans la couronne du roi Hiero.

Ceux qui ont un intérêt dans les dernières nouveautés de la gamme Yamaha/Star, les XV1900 et XV1900S, seront intéressés d’apprendre que Eureka, Californie, était la destination choisie pour la fin du périple des médias pour le lancement de ce nouveau duo en septembre dernier. Connu aux États-Unis sous le nom de Raider, le chopper XV1900 représente la dernière tentative osée de Yamaha sur le marché de la moto.

Naturellement, cela n’est pas surprenant, Yamaha étant certainement le manufacturier japonais le plus anticonformiste pour ce qui est du lancement de nouveaux produits. En fait, avec tout le respect dû aux gens de Harley-Davidson, on pourrait dire qu’en introduisant certains modèles clés comme la Special et la Virago, Yamaha a joué un rôle majeur dans le lancement de la mode des cruisers qui domine encore le marché aujourd’hui. Ce succès est en grande partie dû à une excellente étude du marché. Conçu comme le « cruiser de performance moderne », la nouvelle XV1900 est la porte d’entrée de Yamaha dans un marché où les customs (grand déport du train avant, roue avant de grand diamètre, moteur visible…) se vendent deux fois plus que les « classiques » (long, bas, petite roue avant, pneus larges…).

Le cœur de la nouvelle XV1900 est basé sur le même bicylindre en V de 1854 cm3 à poussoir, refroidi par air qui fut d’abord introduit sur la Roadliner. En réalité, les deux moteurs sont virtuellement identiques, sauf pour l’utilisation sur la XV de l’échappement de type 2-1-2 et deux catalyseurs (par rapport au 2-1 et simple catalyseur de la Roadliner) et l’élimination du radiateur à huile (strictement pour des raisons esthétiques). Cela signifie que la XV conserve la configuration de culasse à quatre soupapes, la soupape EXUP dans le silencieux, le système d’injection d’essence à boucle fermée, les contre-balanciers d’équilibrage, une transmission à 5 rapports et un embrayage hydraulique. Il fournit aussi le même couple généreux de 123,7 lb-pi à 2 500 tr/min. La transmission à courroie est aussi conservée, bien que la XV utilise une courroie plus étroite renforcée en fibre de carbone avec un rapport un peu plus long. La seconde raison avancée pour le maintien de la courroie est que cela offre un plus grand choix de roues de remplacement.

Le moteur est solidement monté sur le châssis en aluminium dans un package léger mais rigide. Le bras oscillant, lui aussi fait d’aluminium pour réduire le poids non suspendu, est connecté à un amortisseur monté horizontalement ajustable en précontrainte qui offre 90 mm de débattement. Une fourche conventionnelle non ajustable de 46 mm offre 130 mm de débattement à l’avant. Le reste du train avant est très traditionnel. Afin d’obtenir le style chopper, le train avant doit subir un grand déport, ce qui implique souvent un plus grand effort sur le guidon pour tourner et une direction moins vive, deux compromis que les ingénieurs n’ont pas voulu faire. Grâce aux triples attaches inclinées, un design qui incorpore un angle de chasse de 6 degrés qui s’ajoutent aux 33,2 degrés du châssis, l’angle de chasse total obtenu est de 39,2 degrés. Avec une roue avant de 21 po, cela donne un train avant esthétique avec un déport limité à 102 mm qui permet d’obtenir une direction assez vive, ce qui est appréciable avec une moto qui offre un empattement de 1799 mm.

La XV vient aussi avec un pneu radial de dimension respectable de type 210/40×18". Pourquoi « seulement » un 210 (alors que certains concurrents proposent des 240 et des 250) demanderez-vous ? Afin de ne pas trop sacrifier la tenue de route. Il y a cependant suffisamment d’espace pour installer un pneu plus large pour ceux qui le désirent. À l’avant, un pneu étroit de 120/70 à carcasse diagonale, un choix guidé par les caractéristiques de flexibilité propres à ce type de pneus. Le freinage des 314 kg à sec est confié à un couple de disques avant de 298 mm avec des étriers monobloc à quatre pistons et un simple disque arrière de 310 mm avec un étrier à simple piston. Afin d’offrir la position de pilotage de type bras élancés recherchée par les propriétaires de choppers, la hauteur de selle est de seulement 695 mm, les leviers de commande au pied sont très avancés et le guidon est peu incliné. Bénéfice additionnel, la position droite qui en résulte est annoncée comme étant moins fatigante sur les longues distances et requiert moins d’effort pour combattre la résistance au vent que la position classique plus penchée vers l’arrière des cruisers.

L’attention portée aux détails se manifeste par exemple avec la nouvelle tête de fourche qui contient les fils afin d’obtenir une allure plus épurée. Un réservoir à essence sans soudure stylé en forme de gouttelette fournit une capacité totale de 15,5 l (incluant le réservoir auxiliaire situé sous la selle) et possède une autonomie d’environ 270 km. La triple attache inférieure de fourche en forme d’aile de goéland et le bloc d’instrumentation multifonction monté sur le réservoir contribuent à l’effet esthétique. La XV est présentée en deux versions, celle de base et la S, la différence se situant dans l’utilisation intensive du chrome sur la version S (par opposition au noir sur le modèle de base) sur les roues, les commandes, le phare et les clignotants.

Selon le personnel marketing de Yamaha, l’acheteur moyen d’un cruiser achète 3 000 $ d’accessoires, 60 % de cette somme étant dépensé lors de l’achat de la moto. Il n’est donc pas surprenant que le catalogue d’accessoires de Yamaha/Star compte 36 nouvelles références pour la XV. Le dessin par ordinateur permet de concevoir les accessoires durant la création de la moto, ce qui permet d’offrir un style bien intégré et de prévoir des attaches de fixation sur la moto lors de sa fabrication.

La fiche technique d’un véhicule peut parfois créer des attentes qui sont déçues lors de l’essai. Ce n’est pas le cas de la XV qui a bien tenu ses promesses. Notre premier contact avec la XV a eu lieu après un court vol entre Santa Monica et Red Bluff, situé dans le nord de la partie centrale de la Californie. Ce fut le point de départ de notre randonnée sur la très scénique Highway 36, un endroit formidable pour le lancement d’une nouvelle moto.

Un rapide tour de la moto révèle immédiatement la grande attention portée aux détails. Les fils sont bien dissimulés  présentant ainsi une apparence propre et bien organisée, et permettant d’orienter le regard sur les composantes stylées. Le réservoir à essence est très réussi et le moteur bien fini occupe la place centrale, comme il se doit. La finition est exemplaire avec de belles soudures, une peinture sans défaut et des dessins magnifiques.

En vous asseyant sur la XV, vous remarquez aussitôt la forme sculptée et confortable du siège, et la facilité de poser les pieds au sol. Le guidon est large et place le pilote dans une position relativement penchée vers l’avant. Les leviers sont larges eux aussi et bien dessinés, donnant une impression confortable et naturelle. L’effort au levier d’embrayage est assez léger. Le démarreur fait immédiatement gronder le gros bicylindre, son système perfectionné d’injection à essence ne nécessitant pas de jouer avec un étrangleur. La réponse à l’accélérateur est instantanée même si le moteur à longue course ne peut pas être confondu avec celui d’une Ducati 1098 dans sa manière de grimper dans les tours. Les deux silencieux offrent une sonorité profonde, sans être trop bruyante, avec un rythme saccadé très apprécié des amoureux de cruisers.

Après avoir engagé l’embrayage, je me suis vite trouvé en train de chercher le sélecteur de vitesse, tapant du pied dans le vide avant de finalement le trouver. En effet, il est en avant, très en avant, presque trop pour ma taille de 5’8″. Le changement de rapport se fait bien, avec le « clunk » typique. La réponse à l’accélérateur est douce et les transitions d’ouverture et de fermeture des gaz aussi. Il y a un léger effet de frein moteur lorsque l’accélérateur est relâché, mais rien de dérangeant. En passant les rapports rapidement, l’accélération est bonne pour une moto de cette taille et de ce poids. Il n’y pas de compte-tours mais un tel accessoire n’est pas nécessaire avec un moteur qui génère autant de puissance à bas régime. Pour dépasser, il suffit de tourner la poignée et le moteur répond avec une poussée calme.

À un rythme de croisière sur autoroute, le moteur fonctionne avec douceur sous l’effet des deux arbres d’équilibrage, tout en gardant sa sonorité caractéristique. Malheureusement, il n’en va pas de même pour les rétroviseurs qui sont brouillés dans la zone critique de 90-110 km/h. À des vitesses supérieures ou inférieures, ils vont bien et bénéficient d’une bonne visibilité. Le bloc d’instrumentation n’est pas bien placé car il est nécessaire de quitter la route des yeux pour le consulter, ce qui n’est pas très recommandé.  Par contre, il est simple à lire et le bouton de sélection de fonctions (situé sur l’avant gauche du guidon) est facile à atteindre et à utiliser.

Comme prévu, la position de pilotage assez droite est efficace pour combattre la pression du vent et elle se révèle moins fatigante sur les bras que la position classique penchée vers l’arrière. La mousse ferme du siège finit par se sentir quand les kilomètres s’accumulent sans que cela soit insupportable. Heureusement, la suspension absorbe bien les bosses et le guidon présente une courbure confortable.

La stabilité en ligne droite est excellente et le comportement en courbe dépasse mes attentes, la 1900 maintenant sa trajectoire en courbe sans nécessiter de constantes corrections. La tête de fourche à déport, le centre de gravité bas et le large guidon travaillent ensemble pour offrir une direction assez vive et légère, malgré la largeur du pneu arrière et son long empattement. En fait, la XV répond mieux que les modèles concurrents équipés de pneus plus larges et bénéficiant d’une géométrie de direction plus agressive. La garde au sol est décente et suffisante pour la plupart des pilotes. Le seul défaut est une tendance au louvoiement sur les bosses en virage, qui résulte certainement des suspensions molles qui ont du mal à les avaler. Les légers ressorts utilisés dans la suspension avant occasionnent une plongée importante lors des freinages, tandis que le manque d’amortissement entraîne l’avant à monter et redescendre plusieurs fois après un arrêt. Les freins fonctionnent bien, même s’ils nécessitent une poignée de main vigoureuse pour un arrêt rapide. L’étrier arrière est puissant sans faire bloquer facilement la roue.

Finalement, Yamaha nous avait fait essayer une XV bien garnie en accessoires afin de les mettre en évidence. Comme promis, ils étaient très bien intégrés avec la moto et affichaient une belle finition. Vous verrez certainement des XV équipées d’accessoires sur les routes l’été prochain ! La XV, un cruiser de performance moderne, s’avère une expérience plaisante et amusante. Après tout, le choix d’Eureka comme destination finale n’était peut-être pas un hasard !
 
Pour mettre en évidence si possible :
La tête de fourche à déport, le centre de gravité bas et le large guidon travaillent ensemble pour offrir une direction assez vive et légère.

Comme prévu, la position de pilotage assez droite est efficace pour combattre la pression du vent et elle se révèle moins fatigante sur les bras que la position classique penchée vers l’arrière.

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