Scott Flying Squirrel, l’écureuil avant-gardiste!

Par Claire MartinPublié le

Ce mois-ci, je vous propose un saut dans le temps un peu plus grand que d’habitude, mais vous constaterez rapidement que la moto qui nous intéresse relève d’une technologie moderne. Comment ne pas être troublé par l’étrange similitude de la Scott Flying Squirrel, petite anglaise des années 20, avec la sportive japonaise Yamaha RD350LC des années 80?

La sortie des versions liquides des bicylindres Yamaha au début des années 80 souleva l’enthousiasme général devant tant d’audace et de nouveauté. Pourtant, dès les années 20, un certain Alfred Angus Scott avait tracé la voie. Entre 1897 et 1920, cet ingénieur britannique déposa plus d’une cinquantaine de brevets, pour la plupart en lien avec la technologie des moteurs deux-temps. C’est en 1908 qu’apparaît le modèle considéré comme la première vraie Scott, une cylindrée de 333 cm3 très avant-gardiste. L’architecture de cette moto sera conservée, un record, jusqu’à la fermeture de l’entreprise en 1961. Cette machine est propulsée par un moteur deux-temps situé très bas dans le cadre et constitué de deux cylindres parallèles inclinés vers l’avant, face à la route et dont les culasses bénéficient du refroidissement liquide.

La Scott se distingue par son étrange et solide cadre composé d’un treillis de tubes droits rejoignant la colonne de direction au moteur pour la partie frontale. Ce cadre offre le double avantage d’être à la fois très rigide, conférant à la moto une exceptionnelle tenue de route pour l’époque, et réparable par le premier forgeron venu. Au fil des ans, la cylindrée des Scott augmentera constamment pour atteindre jusqu’à 596 cm3, et nombre d’améliorations et d’options apparaîtront, souvent au libre choix du client, au point que l’on peut dire qu’il n’y a jamais vraiment eu de modèle type produit en série. Cependant, toutes les Scott seront les dignes descendantes du modèle 1908.

Le génie de Scott s’employait à relever des défis en vue de créer une moto toujours plus performante. Nombre de ses inventions ont fait date. C’est lui qui pour la première fois retient le démarrage au kick starter pour la série, ainsi que la transmission secondaire par chaîne alors que l’époque est à la courroie. Il innove également avec le graissage séparé et l’admission par distributeur rotatif adoptée en 1911. Ce type d’admission ne remet pas en cause le cycle de base du deux-temps, par contre, il apporte une maîtrise incomparable de l’admission des gaz. Rendez-vous compte qu’il faut attendre les années 60 pour que ce système connaisse ses heures de gloire lors des victoires en compétition des célèbres MZ est-allemandes, pour donner suite aux études de Walter Kaaden qui en fut considéré à tort comme le père.

Alfred Scott, comme bien des constructeurs de moto de l’époque, aime aligner ses machines sur les lignes de départ des nombreuses compétitions lui permettant de tester ses futurs développements. La légèreté de ses motos, leur excellente tenue de route et la puissance du moteur deux-temps face aux gros quatre-temps de l’époque font rapidement un malheur, au point que les Scott se voient imposer un ratio compensateur par rapport aux machines de même cylindrée quatre-temps dans le but de ne pas enterrer la concurrence. Les médailles d’or pleuvent. On retient la victoire au Senior Tourist Trophy de l’île de Man de 1912, alors qu’elle est la plus petite machine engagée et également le premier deux-temps à remporter cette célèbre course. Elle récidive dans la même épreuve l’année suivante contribuant à l’affluence de commandes.

La production en série sera stoppée dans son élan par la Première Guerre mondiale. En 1919, après un différend avec ses partenaires, Alfred Scott quitte définitivement l’entreprise. Loin de se sentir désemparée, l’équipe sort en 1922 la Squirrel qui deviendra le modèle phare de la marque. Il faut dire que le fondateur de la compagnie avait su donner une telle personnalité à ses machines que celles-ci lui survécurent bien après son départ. Il fut emporté prématurément à 48 ans d’une pneumonie. Au niveau mécanique, l’eau s’impose alors pour le refroidissement des cylindres au complet. En 1926, le réservoir ovoïde, baptisé « la boîte à biscuits » par les Anglais et situé sous la selle, laisse place au réservoir en selle sur la Flying Squirrel qui sera produite jusqu’en 1940.

Malgré les évolutions de sa mécanique, le bicylindre deux-temps s’essouffle dès les années 20, fasse aux moteurs quatre-temps qui gagnent en fiabilité et en efficacité. La crise boursière de 1929, puis la Seconde Guerre mondiale ébranlent la compagnie qui frôle le dépôt de bilan en 1931 et ne peut l’éviter en 1950. Différentes tentatives sont menées pour remettre en marché une machine plus performante, mais la compagnie ne peut se défaire du twin qui lui collera à la peau jusqu’à sa fermeture définitive en 1961. L’histoire peu ordinaire de cet engin exceptionnel et sa production qui sera toujours restée confidentielle contribueront à en faire une pièce recherchée des collectionneurs. Combien y en a-t-il au Canada actuellement? Quatre, cinq? L’Épopée de la Moto se contente d’en rêver pour l’instant!

FICHE TECHNIQUE Flying Squirrel 1926

ANNÉE : 1926 à 1940
PAYS : Grande-Bretagne
COMPAGNIE : Scott Motorcycle Company
MOTEUR : bicylindre deux-temps refroidi par eau
CYLINDRÉE : 596 cm3
PUISSANCE : 34 chevaux 5 200 tr/min
CARBURATION : carburateur unique
ALIMENTATION : par la jupe du piston
TRANSMISSION : 3 vitesses avec changement à la main
CADRE : treillis
SUSPENSIONS : avant à parallélogramme
VITESSE MAX. : 110 km/h (70 mph)
POIDS : 147 kg (325 lb)

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