L’être humain a cette fâcheuse habitude d’imputer à autrui la responsabilité de ses malheurs, petits ou plus grands. Dans la vie, comme à moto, ce n’est souvent « pas de sa faute ». L’Homo sapiens recherche fréquemment le coupable de tout ce qui lui arrive de moins agréable, alors qu’en réalité, nous sommes très souvent responsables de ce qui nous arrive. Il ne s’agit pas ici de faire un essai sur la psychologie humaine, mais voilà…
En 2010 (ou 2011?), c’est la veille de la Saint-Jean-Baptiste, je suis chez des amis au bord du feu de camp. Une chaleur estivale enveloppante et réconfortante règne, les rires joyeux des amis résonnent, l’ambiance est à la fête. Ça sent l’orage et l’humidité envahit l’air ambiant. La pluie commence ensuite à tomber et semble vouloir s’intensifier. Avec mon copain, nous décidons de quitter prématurément la soirée. Nous enfourchons alors nos motos et n’avons que quelques kilomètres à parcourir pour se rendre à la maison. Il pleut maintenant « à boire debout »…
J’arrive à une intersection et me prépare à effectuer un virage à gauche. Mon clignotant enclenché, je procède prudemment, car les conditions ne sont vraiment pas favorables. En m’avançant sur le bitume mouillé, je roule sur une de ces flèches blanches peintes sur sa surface. En tournant, un réflexe me fait malheureusement appuyer sur le levier du frein avant : ERREUR! La moto glisse et me projette au sol… Elle est un peu abimée mais fonctionnelle, malgré les contrôles déformés ou déplacés. Sous le choc et avec quelques bonnes ecchymoses, je ne me sens pas capable de conduire. Un ami me ramène à la maison alors que mon copain s’occupe du rapatriement de ma moto.
Où je veux en venir? C’est qu’au lendemain de mon accident, j’appelle ma compagnie d’assurance afin de leur faire part de l’incident et de commencer les démarches de réclamation. En discutant avec l’agente d’assurance, j’apprends que JE suis responsable de l’accident. Oui oui! Je m’obstinais même avec elle : « Ce n’est pas ma faute, c’est la flèche, c’est la faute de la flèche! » Vous voyez? Je mettais ça sur la faute de la flèche et de sa peinture glissante, alors qu’effectivement c’est une erreur de ma part, une mauvaise anticipation et un réflexe inadéquat qui ont engendré le tout.
Évidemment que ces flèches, lignes blanches (ou jaunes) deviennent très glissantes par temps de pluie. Elles le sont également lors de chaleurs intenses quand même le goudron sort des pores de l’asphalte! Il faut être particulièrement prudent pendant les 15 premières minutes d’une ondée. Le mélange entre l’eau, la poussière et l’asphalte gorgé d’huile résulte en un cocktail des plus glissants, d’autant plus quand on a seulement deux roues en contact avec le bitume. Rappelez-vous qu’il faut en tout temps éviter de rouler sur cette peinture. En y freinant de l’avant, l’accident y est alors presque inévitable.
Une situation semblable m’est arrivée quelques années plus tard. En Ontario, je suis seule et je reviens du Boldt Castle dans les Milles-Isles. Après une belle journée chaude et ensoleillée, le ciel s’obscurcit dangereusement et la pluie se met de la partie. Encore un virage à gauche pour aller rejoindre la 401 (ces virages me hantent depuis ma chute), la moto semble vouloir se coucher après avoir glissé de l’arrière cette fois, sans même avoir touché aux freins. En donnant un coup de gaz, elle s’est redressée comme par magie. J’ai eu la frousse, mais je m’en suis sortie pas mal mieux que la fois précédente. Il faut savoir qu’à ce moment, je suis chaussée sur un nouveau pneu arrière qui, je l’apprendrai plus tard, était défectueux. Son caoutchouc étant trop sec, ce pneu a carrément fendu quelques semaines plus tard. L’adhérence n’y était pas mais ma réaction, oui. L’expérience a pris la relève. Nous devons adapter notre conduite aux conditions, toujours anticiper et savoir réagir. Avec l’expérience, l’instinct de réaction se fait beaucoup plus naturellement.
Tant qu’à y être, gare aussi aux flaques d’eau! S’engager dans une flaque sans ralentir pourrait s’avérer être une bien mauvaise idée. La réputation des nids-de-poule québécois est reconnue. Les feuilles mortes à l’automne, le gravier au printemps sont autant de facteurs qui commandent une attention particulière, surtout lorsqu’il pleut.
Tout cela pour dire que j’évite dorénavant de rouler sur l’asphalte peinte, que j’anticipe tout ce que je peux, et que je suis responsable de ma conduite…
Soyez prudents et au plaisir de se croiser sur la route!