Je suis encore coincé dans un bouchon et je vois une interminable file de véhicules immobilisés sur les trois voies devant moi. Depuis ce matin le mercure est passé d’un frisquet 6 degrés Celsius dans la brume à couper au couteau à un beau 21 degrés ensoleillé cet après-midi, mais présentement je ne sais plus trop comment ajuster mon habillement. J’ai enfilé ma doublure et je transpire dans les bouchons, par contre, avec le soleil qui baisse à l’horizon, l’air est frais dès que je peux reprendre de la vitesse. Toutefois, les portions où je peux laisser ma Ducati chanter en sixième sont de courte durée.
Ça fait au moins trois heures que je perds depuis que j’ai franchi la frontière, dans ces bouchons sur cette 401 qui n’est pas la route la plus enivrante à rouler par ce beau lundi du long week-end de l’Action de Grâces. J’espérais que la circulation devienne plus fluide passé Toronto, mais c’est le contraire qui se produit, les zones de construction se succèdent, entrecoupées de divers accrochages et autres rétrécissements des voies.
Je regarde l’heure d’arrivée affichée sur l’écran qui ne fait que reculer et reculer encore. J’oublie peu à peu l’idée de faire un Iron-Butt aujourd’hui; mon GPS m’indiquait 1641 kilomètres à parcourir pour me rendre à la maison ce matin, lorsque j’ai quitté New Buffalo, au Michigan. Ce sera pour une autre journée. La route la plus directe s’avère le prix à payer lorsque l’on doit voyager rapidement, j’imagine. Si j’avais le choix, je ne me retrouverais pas sur une voie supposément rapide à tenter de résister à l’envie de faire de l’interfile. Et j’aurais surtout le temps de prendre tous les détours qui s’offrent au fil du parcours, mais bon, ce n’est pas dans les cartons pour moi cette semaine, malheureusement.
Si ce n’était de l’attention requise pour survivre à ce chaos, j’aurais le temps de ressasser les images de mon voyage. Je suis sur mon retour d’une virée au Motocross des Nations, à RedBud. Toute une expérience et sans doute l’un des évènements que j’ai le plus apprécié parmi toutes les courses auxquelles j’ai assisté. Voir les reportages sur ces olympiques du Motocross, qui se déroulent chaque automne dans un pays différent, ne donne qu’une vague idée de l’ambiance qui peut y régner.
La boue omniprésente sur le site n’a pas refroidi d’un iota la foule partisane venant de partout dans le monde, bien au contraire, je crois que ça n’a que rajouté à la fête.
Tandis que les bottes de caoutchouc sont de mise pour la grande majorité des quelque 80 000 spectateurs présents, moi je patauge les pieds confortablement au sec dans mes bottes Forma Terra. J’avais prévu des chaussures de rechange en sachant que le sport de spectateur aux courses de motocross n’est pas sans comporter des risques de se salir, mais à RedBud ça prenait plus qu’une paire de chaussures de randonnée!
Les coureurs viennent de partout et les spectateurs aussi, mais bien sûr la grande majorité d’entre eux veulent voir l’équipe hôte remporter le trophée Chamberlain. Ça fait depuis 2011 que les Américains n’ont pas gagné le MXdN, et malheureusement pour eux, les conditions ne les ont pas favorisés. Les pilotes du championnat mondial ont l’habitude de rouler dans des conditions variées, tandis que chez l’Oncle Sam, l’on passe l’hiver à rouler sur des pistes intérieures en supercross pour ensuite profiter des belles journées d’été pour faire le championnat national, la majorité du temps sous le soleil. La sixième place de l’équipe des États-Unis a quelque peu refroidi l’atmosphère au podium, où les Français célébraient leur cinquième triomphe d’affilée.
Au moins ça m’a permis de quitter le stationnement légèrement boueux à une heure raisonnable, sans avoir à faire la file trop longtemps. Je n’aime pas trop être pris dans le trafic, vous savez…
La fin de semaine prochaine je crois que je vais rouler où il n’y a pas d’embouteillage, si ce n’est le risque de se retrouver derrière quelques VTT ou côte-à-côte immobilisés pour voir si l’inondation causée par l’écluse de castor est trop profonde pour franchir la piste!