Comme nous l’avons noté dans notre dernière chronique, l’introduction de chemises en acier insérées dans des blocs-moteurs en aluminium permit de réaliser des améliorations importantes dans le rendement des moteurs, mais les ingénieurs se sont vite rendu compte que la conductivité thermique inférieure de l’acier retenait le progrès. Alors, les démarches cherchant à adapter l’aluminium ont continué.
L’arrivée des revêtements
Dès les années 1940, le chrome est apparu comme revêtement de cylindre dans certains moteurs d’avion, de scies à chaîne et au diesel. Appliqué par électroplaquage à une épaisseur d’environ 0,4 mm, le chrome s’avère très résistant (incluant à la corrosion) et efficace. De plus, bien que sa conductivité thermique soit inférieure à celle de l’aluminium, sa minceur fait en sorte qu’il permet tout de même une évacuation plus rapide de la chaleur qu’une chemise en acier. Toutefois, il n’est pas oléophile, c’est-à-dire qu’il ne présente pas une affinité pour l’huile. On a donc dû développer des techniques spécialisées (incluant la rectification par meule) afin de trouver un moyen de lui faire retenir l’huile. De plus, le chrome avait parfois tendance à s’écailler. Si le chrome a été populaire pendant une certaine période, l’arrivée de nouvelles options plus performantes et économiques a contribué à son éventuelle disparition du monde de la moto.
Suivi alors le Nikasil, un enduit céramique en carbure de silicone très résistant qui se dissout dans le nickel. Introduit par la compagnie Mahle en 1967, celui-ci est électrodéposé sur la paroi du cylindre d’une épaisseur d’environ 0,07 mm. Une fois en place, les segments enlèvent le nickel, exposant le carbure de silicone (composé de particules d’une taille de moins de 4 microns, ou millionièmes de mètre) qui est très dur, voire beaucoup plus dur que l’acier. Puisqu’il est appliqué directement sur l’aluminium (et qu’il est très mince), les cylindres à revêtement Nikasil transmettent la chaleur avec une très grande efficacité, ce qui permet aux ingénieurs de hausser le taux de compression et d’augmenter la puissance du moteur. Le cylindre à revêtement Nikasil possède également des pores microscopiques qui servent à capter l’huile, contribuant ainsi à réduire la friction et augmenter la longévité des pistons et segments. Enfin, la stabilité dimensionnelle des cylindres à revêtement Nikasil est exceptionnelle, permettant de réaliser un meilleur scellage des segments et ainsi hausser l’efficacité. Dans les années suivant l’introduction du Nikasil, de nombreux produits semblables sont apparus et demeurent présents dans le marché.
Le retour de l’acier
Plus récemment, certains fabricants se sont tournés à nouveau vers l’acier, cette fois sous forme de revêtement. Connu sous l’appellation de « revêtement au plasma », il s’agit d’un revêtement appliqué à une épaisseur d’environ 150 microns par un procédé de projection thermique. Plus précisément, un faisceau plasma (à une température de plus de 19 400 °C!) fait fondre de la fonte et la projette (à l’aide d’air comprimé) sur la cible, les particules (d’une taille de 20 à 30 microns) refroidissant aussitôt qu’elles entrent en contact avec le cylindre usiné spécialement pour les accueillir. Une fois refroidi, le revêtement est usiné par diamant pour lui donner les caractéristiques de surface souhaitées. La couche métallique produite est une surface solide et durable; bien que moins dure que le Nikasil, on nous dit que sa porosité et sa capacité à retenir l’huile sont supérieures, faisant plus que compenser sur le plan de l’usure. Tout comme le Nikasil, sa minceur et sa proximité à l’aluminium permettent une excellente évacuation de la chaleur. Le revêtement au plasma a été utilisé dans un véhicule de série pour la première fois dans le moteur de la célèbre automobile GT500 Shelby 2011 de Ford.