La lettre Z n’apparaît pas dans le nom de la marque Kawasaki (bien qu’on le prononce!), mais elle réfère sans aucune hésitation à la première superbike de la marque, la Z900 de 1973. Vinrent ensuite les KZ, GPZ et Ninja qui défendirent les couleurs du Team Green durant les décennies subséquentes. En 2003, l’appellation Z refit surface sous la forme de la Z1000. Succès instantané malgré quelques défauts (vibrations entre autres) qui donna naissance à une version 750 cc l’année suivante. Basée sur le cadre et la mécanique de la Z1000, la 750 était un peu lourde pour une moyenne cylindrée, vibrante elle aussi et un peu moins bien équipée côté freins et suspensions. Bien que très populaire en Europe, elle fut rayée du catalogue canadien après l’année modèle 2007. J’en ai possédé une version S (avec carénage de tête de fourche, voir Moto Journal avril 2015) avec laquelle j’ai écumé nombre de routes au fil des ans toujours sans problème. Je me suis donc réjoui lorsque j’appris son retour en version 800 cc cette année. Bien que nouvelle, en nos terres, cette Z nouvelle mouture remonte en fait à 2013, Kawasaki, voulant redonner un second souffle à sa vieillissante 750, opta pour un bon vieux réalésage (2,7 mm) qui porta la cylindrée à 806 cc. Le but était à l’époque de concurrencer les Yamaha FZ-8 et Suzuki GSR750 (GSX-S750 pour nous depuis l’an passé). Bien que Yamaha ait pris une autre direction avec son 3-cylindres depuis, l’ajout de cette machine vient tout de même combler un vide entre la ER6N et la Z1000, tant du côté performance que du prix.
Je pris donc possession de la machine à la mi-avril, par un vendredi ensoleillé, mais frisquet. En l’enfourchant, les 231 kg (tous pleins faits, il faut le préciser) annoncés semblent placés bas tellement je n’en fais pas cas. Ce ne sera que plus tard, en la reculant, que je m’apercevrai que la hauteur (834 mm) et la largeur de la selle ne m’offrent que très peu de contact au sol et je peine maintenant à lui faire marche arrière sur le sol poussiéreux. Qu’à cela ne tienne, le guidon tombe bien en main, les repose-pieds n’interfèrent pas avec mes tibias et offrent une position de conduite sportive, sans que je sois trop recroquevillé. La selle, plate et large, est ornée d’une tapisserie de Z tout comme sur la version 1000 cc. Bien que son rembourrage soit minimaliste, elle ne me parut pas moins confortable que celle d’une FJ-09. De toute façon, les acheteurs de ce type de moto dénudée ne prévoient que rarement faire le tour du continent… Les informations fournies par le tableau de bord sont simples et concises : température du liquide de refroidissement, odomètre, horloge, consommation moyenne et en temps réel, distance restante avec le contenu du réservoir, jauge à essence, en plus des témoins lumineux habituels. Le compte-tours numérique peut être configuré de trois manières selon les préférences du pilote. Je préférai le mode par défaut qui affiche une escalade de barres horizontales à mesure que le moteur monte en régime. Les autres choix consistent en un affichage inversé du premier de même qu’une simple illumination du régime auquel le moteur tourne. N’ayant pas le manuel du propriétaire en main, je réussis à faire tout fonctionner en jouant avec les deux boutons d’ajustement et de sélection. Pas toujours facile, car aucun des deux n’est identifié!
Après quelques minutes à me familiariser avec la Z, ajustement des rétroviseurs (stylisés, bien isolés contre les vibrations, mais un peu justes quant à leur taille) et du levier de frein avant, je me décidai enfin à prendre la route. En m’engageant sur la bretelle d’autoroute, je ne puis m’empêcher de mettre les gaz, même si les pneus étaient neufs et que la moto ne dispose pas d’antipatinage. Avec la montée des régimes, le son d’admission et celui libéré par le système d’échappement (plus joli que ce que nous a habitué Kawasaki lors des dernières années) me rappelèrent d’agréables souvenirs. Un 4-cylindres qui prend des tours figure parmi mes sonorités préférées. En y allant progressivement et en ne cherchant pas à tester les limites de l’adhérence, je réussis quand même à me donner un avant-goût de ce que seront mes prochaines heures en selle. Le moteur tire fort dès le ralenti et la bande de puissance est linéaire sans creux. L’augmentation de cylindrée a vraiment donné un regain au moyen régime. Je me suis même amusé à laisser la boîte en sixième en décélération jusqu’à environ 30 km/h. En tournant la poignée des gaz à fond, je fus surpris par la qualité de la reprise, aucun à-coup, une montée en régime franche et nette. Seule la limitation de vitesse m’a fait ralentir… Beaucoup de motos développant des chiffres de couple et de puissance plus élevés ne peuvent en dire autant, bel exemple de souplesse. L’injection numérique Mikuni à quatre corps d’accélération de 34 mm à double papillon n’y est pas étrangère. De son côté, la boîte 6 vitesses ne m’a donné aucun faux point mort, bien qu’elle soit en plein rodage. L’embrayage facilement modulable me permit de performer les éternels aller-retour essentiels à toute séance de photos. Par contre, le rayon de braquage entre dans la catégorie virage en trois points. Effectuer un demi-tour sur un chemin de campagne demande de se remémorer le cours de conduite section contrepoids.
Je me dois de mentionner que ma machine était accessoirisée d’un petit pare-brise qui, bien que minimaliste, réussit à dégager le torse du pilote du flux d’air à vitesse d’autoroute. Cet accessoire, qui ne vient en aucun temps altérer la ligne de la moto, permet de soutenir les vitesses d’autoroute sans trop souffrir au niveau du torse et du cou. L’autre option, un couvre-selle remplaçant la portion passager, ajoute à l’allure agressive et s’intègre très bien aux lignes de la machine. Ne disposant pas de la selle passager, je ne pus la faire tester, mais j’imagine que le confort serait semblable à sa version 750 cc, donc bonne pour une petite randonnée, mais à proscrire pour un voyage longue distance. Caractéristique intéressante pour ceux désirant arrimer des bagages sur la portion passager de la selle : de pratiques crochets situés sur l’aile arrière permettent de sécuriser le tout. Deux cavités de part et d’autre de la section arrière permettent au passager de se retenir en l’absence de toute autre poignée de maintien. Pour ce qui est des suspensions, à l’avant une fourche inversée de 41 mm avec précharge du ressort et amortissement en détente ajustables, elles sont combinées à un monoamortisseur avec réservoir externe à l’arrière. Ayant effectué cet essai en tout début de saison (lire saison des trous de poules comme dirait le maire Labeaume), les suspensions furent sollicitées à souhait. Sans parler d’un confort d’une machine de grand tourisme, je peux dire que la calibration permet un usage sportif modéré sans avoir la sensation de se mettre dans le trouble trop souvent! Côté freinage, les deux disques crénelés semi-flottants de 310 mm à l’avant avec étriers à quatre pistons opposés jumelés au simple disque arrière de 250 mm à étrier à deux pistons opposés sont facilement modulables, puissants et dotés de l’ABS, ce qui fait grandement défaut à sa concurrente à trois cylindres chez la marque aux trois diapasons. L’ajustement de la distance de la poignée permet un meilleur contrôle, quelle que soit la taille des mains du pilote.
Avec une consommation affichée de 6,4 litres/100 km, on pourrait croire que nous avons affaire à une moto énergivore (en comparaison, la Z750 affichait un 5,7 litres/100 km). À sa défense, il faut prendre en considération que lors d’une séance de photos doublée d’un tournage télé, les passes à régime élevé sont plus fréquentes qu’à la normale. De plus, la moto affichait 0 km lors de la prise de possession. La jauge à essence, comme pour la majorité des motos que j’ai possédées ou roulées, se montra pessimiste (le contraire serait bien pire de conséquences, avouons-le!) et m’obligea à faire le plein alors qu’il me restait pour au moins 100 kilomètres d’autonomie! Avec sa capacité de 17 litres, la marque des 300 kilomètres d’autonomie demeure réaliste si le pilote n’abuse pas de la poignée de droite… comme je le faisais parfois avec ma 750.
Si j’étais à la recherche d’une moto de moyenne cylindrée de style dénudé, je considérerais sérieusement cette Z800. Normal, direz-vous, tu en as déjà possédé une! Oui et non. Là où la mienne péchait (vibrations aux régimes les plus intéressants, freins et suspensions ordinaires), la 800 excelle. Et je ne parle même pas de l’ABS de série qui aurait probablement sauvé la vie de ma défunte monture… Avec un prix suggéré de 9299 $, elle ne constitue pas l’aubaine de la catégorie, mais elle ne fait pas figure de parent pauvre non plus. Si, pour vous, les départs avec la roue avant dans les airs ou encore les choix de modes d’injection ne signifient pas un argument d’achat, elle saura vous combler. Un vaste éventail de motocyclistes d’âge et de niveau de conduite, allant de l’intermédiaire au pilote expérimenté qui désire une moto sportive sans pour autant tomber dans la délinquance, constituent le public visé par ce roadster. La Z800 figure depuis son lancement dans le top-10 des meilleures vendeuses en France; il ne s’agit sûrement pas d’un hasard. Nous pouvons nous considérer chanceux que Kawasaki lui donne une seconde chance sur notre marché.
Fiche technique
MODÈLE |
Kawasaki Z800 ABS |
PRIX |
9299 $ |
MOTEUR |
4 cylindres en ligne, 4-temps DACT, 4 soupapes par cylindre refroidi par liquide |
PUISSANCE (ANNONCÉ) |
113 ch |
COUPLE (ANNONCÉ) |
61,2 lb-pi de couple à 9000 tr/min (annoncé) |
CYLINDRÉE |
806 cc |
ALÉSAGE ET COURSE |
71 x 50,9 mm |
RAPPORT VOLUMÉTRIQUE |
11.9 : 1 |
ALIMENTATION |
Injection numérique 4 corps d’accélération Mikuni de 34 mm à double papillon |
TRANSMISSION |
Six rapports à entraînement final par chaîne |
SUSPENSIONS |
Fourche inversée de 41 mm ajustable en détente et précontrainte et monoamortisseur au gaz ajustable en précontrainte et détente |
EMPATTEMENT |
56,9 pouces 1445 mm |
FREINS |
2 disques crénelés semi-flottants à l’avant de 310 mm avec étriers à quatre pistons opposés; disque arrière crénelé de 250 mm avec étrier à 2 pistons opposés |
PNEUS |
120/70-ZR17 devant ; 180/55-ZR17 derrière |
POIDS À SEC EN ÉTAT DE MARCHE |
231 kg 509 lb |
HAUTEUR DE SELLE |
834 mm 32,8 pouces |
RÉSERVOIR DE CARBURANT |
17 litres |
CONSOMMATION |
6,4 litres/100 km (44 mi/gal) |
AUTONOMIE |
Environ 300 km |
DURÉE DE L’ESSAI |
274 km |
GARANTIE |
12 mois |