L’huile synthétique: Un survol historique

Par Michel GarneauPublié le

Quiconque a été propriétaire d’une moto (ou d’un véhicule moteur en général) a fort probablement eu droit à un des discours suivants : « Mets-y pas de la synthétique, ton embrayage va glisser… » ou « Une fois que tu as mis de la synthétique, tu ne peux pas retourner à la minérale… » parmi tant d’autres. Eh oui, l’huile à moteur dite synthétique est sans aucun doute le produit moteur le plus assujetti aux opinions variées, pour ne pas dire légendes urbaines, qui soient. Parlons d’un élixir magique pour certains et un gaspillage d’argent pour d’autres, mais de quoi s’agit-il au juste?
Minérale : le point de départ

Pour le commun des mortels, il existe essentiellement deux grandes catégories d’huiles à moteur : minérale et synthétique (la semi-synthétique étant simplement un mélange des deux). Comme son nom nous laisse croire, l’huile minérale est issue du raffinage du pétrole. Comme nous l’avions démontré lors de notre discussion sur l’essence (Moto-Tech Août 2015), le processus de raffinage du pétrole brut permet de séparer les nombreux composants (hydrocarbures) en groupes de produits semblables, dont l’huile (à moteur).

Synthétique, tu dis?
De façon générale, lorsqu’on parle d’un produit synthétique, on fait référence à une matière issue d’une intervention humaine ou, dit autrement, qui n’est pas produite naturellement (ou qui n’existe pas dans cet état dans la nature). Alors, si l’on se fie à ceci, l’huile synthétique est simplement une huile produite suite à un processus chimique? Il y a 20 ans et plus, la réponse aurait été un simple oui, les huiles dites synthétiques étant comprises principalement à partir de deux groupes de composés chimiques, soit les huiles à base de polyalphaoléfines (ou PAO) ou celles aux esters. Dans les deux cas, il s’agit de composés chimiques synthétisés dans un laboratoire. Le contexte de la réponse posée ci-haut changea à la fin du 20e siècle cependant.

Et la zone grise fut
Les avancées dans la technologie de raffinage durant les années 1980 et 1990 servirent à réaliser des produits (soit des huiles minérales) qui se rapprochèrent beaucoup des huiles synthétiques de l’époque au niveau de la qualité et du rendement. Plus important encore, cette technologie créa une sorte de zone grise quant à la classification des produits qui en furent issus, chose que certains (sans grande surprise) ont choisi de tenter d’exploiter.

En 1997, la société Castrol changea la composition de certaines versions de sa gamme d’huiles à moteur Syntec, passant à l’utilisation d’une huile issue de l’hydrocraquage d’huile minérale, une option moins dispendieuse, tout en continuant à vendre les huiles en question comme étant « 100% synthétiques ». Son compétiteur ExxonMobil , fabricant des huiles Mobil 1, déposa aussitôt une plainte avec la division de la publicité de l’office américain de protection des consommateurs (NAD) sous prétexte que la vente de l’huile Syntec reformulée constituait une publicité mensongère. Dans le cadre de son enquête, le NAD chercha à établir ce que signifiait exactement le mot « synthétique ». Mobil, de son côté, avança que l’huile synthétique était une huile composée de longues molécules produites à partir de plus petites molécules, alors que Castrol parla plutôt du « produit d’une réaction chimique voulue ». En fin de compte, le NAD trancha en faveur de Castrol, changeant ainsi les normes gérant l’utilisation de l’expression. Sans grande surprise, la plupart des huiles portant l’étiquette synthétique en Amérique du Nord sont depuis composées majoritairement d’huiles issues de l’hydrocraquage d’huile minérale.

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