Avec l’expérience vient la sagesse.
Du moins, certains le disent! S’il y a une sagesse que j’ai acquise, c’est sûrement celle d’apprendre toujours un peu chaque jour. Et pour ce faire, il n’y a rien de mieux, je crois, que de partager ses connaissances avec ceux qui peuvent en profiter. Mettre en pratique une technique maîtrisée depuis plusieurs années est simple, souvent trop simple pour que l’on y porte attention. Transmettre la façon d’appliquer cette même technique oblige de la transposer en des termes clairs, bien définis et facilement assimilables pour un non-initié. Cela nous force à bien comprendre ce que l’on exécute comme geste, disséquer les étapes et les mettre en ordre tout en précisant les points importants.
Enseigner à piloter une moto est ce qui m’aide le plus à me rendre compte qu’il y a plein de petites choses que je fais tout croche, de façon nonchalante ou encore que j’omets carrément. Ayant fait mes armes en compétition, presque à mes tout premiers débuts, je n’ai eu d’autre choix que de me concentrer sur mon pilotage. Après un cours de base pour rouler en circuit, je me suis vite rendu à l’évidence que j’avais énormément à apprendre. Le dicton populaire qui dit ce qu’on ne sait pas ne fait pas mal ne s’applique vraiment pas au monde des deux roues motorisés. Surtout en course! Il n’est pas souhaitable que ce soit à fond de sixième, au bout de la longue ligne droite avant le virage serré que l’on se rende compte que notre inventaire de connaissances ne contient rien dans le département « freinage intensif ». Si c’est le cas, vous pouvez être assuré que ça va faire mal! Si des gènes portant à de tels comportements ont déjà existé dans la génétique de l’espèce humaine, ne vous en faites pas, la sélection naturelle s’est occupée de régler ces cas. Rapidement et définitivement!
Pour apprendre, poser des questions à ceux qui en savent un peu plus peut apporter des réponses. À écouter ceux qui avaient plus d’expérience, à lire des livres sur la technique, à observer attentivement et aussi à expérimenter, parfois avec plus ou moins de succès, j’ai fini par atteindre un certain niveau, dont je suis quand même assez fier. J’ai appliqué une partie de ce que j’ai appris en circuit à mon pilotage sur la route bien sûr. Ensuite, ce fut le hors route, principalement le motocross. Là, je me suis retrouvé au bas de l’échelle et à mes débuts dans cette discipline, j’ai malheureusement constaté à quelques reprises que j’avais entrepris des manœuvres au-delà de mon niveau. Pas grave, on se relève, parfois un peu étourdi, on s’époussette et on repart… quand il n’y a rien de cassé! C’est en hors route que j’ai commencé à donner des formations de base et à enseigner les techniques. J’ai alors vite compris ce que je mentionnais au début de cet article. Je suis par la suite revenu sur les circuits pour le plaisir et je me suis encore retrouvé à faire des initiations et aussi à transmettre mes connaissances.
Maintenant que j’ai la chance de donner des formations complètes, je suis de plus en plus conscient de chaque détail de mon pilotage. Être un modèle m’oblige à prendre le temps de faire la démonstration des techniques exactes et à force de répétitions, même mes propres mauvais plis disparaissent. Voir et corriger les erreurs et les mauvaises façons de faire des élèves aident aussi à mieux comprendre l’interaction entre l’humain et la machine. Doués ou pas, nous descendons tous d’un homo sapiens qui a évolué sur quelques dizaines de milliers d’années en gérant la vitesse qu’il pouvait produire par lui même… à pied, même pas avec une bicyclette! Et encore moins une 1000 cc de 180 chevaux pour 200 kilos! Pas surprenant que nos réflexes et notre instinct aient besoin d’un peu de reprogrammation pour se sentir à l’aise avec nos montures, et ce, même s’il ne s’agit que d’un scooter. Et puisque notre programmation de base est sensiblement la même pour tous, travailler sur celle des motocyclistes, ou futurs motocyclistes, à qui j’enseigne m’aide vraiment à mieux comprendre et exploiter la mienne. J’ai assez d’expérience pour savoir que chaque pilote qui commence à bien assimiler et maîtriser son pilotage croit avoir fait la plus grande partie de l’apprentissage, qu’il est près du but…
C’est bien de rêver, et c’est grisant comme sensation, mais la vraie beauté du monde de la moto, c’est qu’il y a toujours quelque chose à apprendre!