Virée dans Charlevoix entre amis

Par Marc ParadisPublié le

Organiser une randonnée, même de courte durée, demande un minimum d’organisation. Lorsque le nombre de participants devient exponentiel, le recours à des supports logistiques, voire même impliquer les autorités locales, est parfois à tenir en compte (parlez-en à J.-S. Levan, organisateur de la randonnée pour le petit Alexis, voir Moto Journal Sept.-Oct.). En juin dernier, une idée de randonnée informelle regroupant mes amis proches et élargis via Facebook commença à germer entre mes sessions de rédaction. L’occasion de se rencontrer tout en découvrant pour certains un coin de pays différent me semblait intéressante. En prime, je pourrais tester dans son élément (sport-tourisme) la CFMoto TK650 qui prenait place dans mon garage à cette période. Je lançai donc l’idée via les médias sociaux en fixant la date au 12 juillet et Charlevoix comme destination. L’intérêt y était pour certains, mais avec notre très courte saison estivale, plusieurs étaient déjà retenus par d’autres activités ou se désistèrent, eux qui, au premier jour, se disaient très intéressés.  

Ce fut donc un groupe restreint, mais composé de vrais passionnés de moto qui roulent leur bosse sur deux roues depuis au moins 20 ans, qui me confirmèrent leur présence… Je les connais certains depuis longue date, d’autres depuis peu, mais les atomes crochus de la moto font en sorte que le courant passe. Par contre, eux ne se connaissent pas tous… L’occasion viendra de faire plus ample connaissance durant la journée, car entre tripeux de motos, les sujets ne manquent jamais! Nous formions donc un petit groupe de 6 motos en ce beau samedi matin ensoleillé dans le stationnement du Tim Hortons au coin Hamel et Henri IV. Xavier (notre fils cadet et aussi mon fidèle passager) et moi sur la CFMoto, Isabelle pilotant la SV de Vincent (notre aîné) retenu par son boulot, Michel (mon photographe officiel et ami depuis le cégep) sur sa ZR7S, Guy (le racer) avec sa Ducati ST4S et, finalement, Marc sur sa fidèle ST1300. Bruno et sa passagère Rosalie (BMW R1150R) se joindront à nous à Boischatel. Rouler en groupe ne m’attire pas vraiment. Car à plus de trois motos, les dépassements demandent un peu plus de planification, les distances de freinage sont allongées et le manque d’attention de certains peut engendrer des situations potentiellement dangereuses (j’ai déjà vécu!)… Heureusement, notre petit groupe étant composé de motocyclistes habitués à rouler en groupe, je n’aurai pas à me transformer en gardien de la discipline, ce qui serait vraiment un rôle de composition dans mon cas!  

Fidèle à sa réputation d’avaleur de bitume, Guy, qui a déjà parcouru 150 km pour nous rejoindre, est déjà attablé au Tim, essayant en vain de capter les qualifications du Grand Prix d’Allemagne de MotoGP sur sa tablette. Xavier (fanatique de la discipline autant que notre racer) riait dans sa barbe – qui poussera dans quelques années – et le savait que ce matin-là, les qualifications se déroulaient plus tôt… nous les avions regardées en déjeunant à la maison! Nous attendons Michel, dont le sommeil fut écourté par une soirée au Festival d’été et qui, fidèle à son habitude (je le connais depuis 1986), arrive à l’heure, mais doit quand même avaler une bouchée et un café avant le départ! 

Ce matin-là, la circulation semble un peu plus dense sur la 40 en direction est. Est-ce un prélude à ce qui nous attend pour le reste de la journée? En arrêtant à la station-service sur le boulevard Sainte-Anne, où mes compagnons renouent ou rencontrent pour la première fois Bruno et sa sympathique fille Rosalie, nous sommes en mesure de constater l’ampleur de la circulation, beaucoup plus dense au fil des kilomètres… Qu’importe, nous aurons nos chances de dépassement lors des prochaines montées à partir de la côte de la Miche à Saint-Joachim. Charlevoix s’apprécie plus à moto qu’avec tout autre moyen de locomotion. L’enchaînement de montées, de descentes et de courbes rapides se prête bien au pilotage d’une moto et encore plus aux modèles sport et sport-tourisme. Ayant laissé Bruno prendre la tête de notre convoi (étant originaire de la Côte-de-Beaupré, il connaît bien le coin, en théorie!), je peux donc profiter du paysage au lieu de me concentrer sur la cadence à maintenir. Habituellement, je ne suis jamais le premier lors de nos sorties familiales; je laisse Isabelle dicter le rythme, étant beaucoup plus « raisonnable » que moi dans cette tâche… Notre cadence, un peu plus élevée que celle du trafic ambiant lors des montées, nous n’avons aucune peine à distancer le flot des vacanciers. En arrivant au point le plus élevé (740 m), nous pouvons sentir une petite fraîcheur… ce sera la seule de cette chaude journée! Un peu après 11 h, nous arrêtons, comme convenu, au kiosque d’informations touristiques juste avant Baie-Saint-Paul. Profitant de cette randonnée pour faire l’évaluation et les photos de la 650TK, Guy me propose un itinéraire alternatif à la route du Port, mieux connue sous le nom de côte des Éboulements, dont le tracé fut modifié en 1999-2000 à la suite du tragique accident d’autobus qui plaça la communauté de Saint-Bernard-de-Beauce dans le deuil en octobre 1997 (43 des 44 victimes provenaient de ce village). La côte à Godin, qui relie la 362 à Saint-Joseph-de-la-Rive, devrait nous donner droit à de belles prises de vue… Connaissant mon lascar, je m’attends à tout… et je ne fus pas déçu! Étant habitué au nouveau tracé qui peut être négocié à un très bon rythme en moto, je m’attendais à une petite route panoramique… Dans les faits, la côte à Godin pourrait se nommer la côte « senteur de freins »… tellement ces derniers sont sollicités! Virage en épingle, courbes serrées, le tout sur un dénivelé nous amenant rapidement au niveau du fleuve. J’apprécie la suggestion et, une fois rendus sur le chemin du Quai où la file d’attente pour le traversier de l’Isle-aux-Coudres commence à s’allonger, nous proposons de refaire quelques aller-retour aux fins de ce reportage. Curieusement, l’idée ne trouve pas preneur. Certains prétextant la chaleur, d’autres le peu de dégagement pour les nombreux virages en U nécessaires lors de la prise de photos… Nous ne serons que Guy et moi (même mon passager se désista) à passer sous l’objectif de Michel, couché par terre à la sortie du virage le plus prononcé. Après une dizaine de passages, il a enfin les clichés recherchés, ouf! Pendant ce temps, nos compères se mirent à la recherche d’un resto sur la rue Principale de Saint-Joseph-de-la-Rive. Leur choix se fixa sur l’auberge La Maison sous les pins. En plus des pins, les parasols de la terrasse nous protégèrent du soleil pendant que nous dégustions des spécialités du chef préparées près de nous (burger aux trois gibiers (wapiti, sanglier, bison) pour ma part…). Après le lunch, Bruno, notre guide à temps partiel, nous propose le Moulin seigneurial des Éboulements comme autre attrait touristique et potentiel lieu de mise en scène pour les photos. Construit en 1790 par le seigneur Jean-François Tremblay au sommet d’une chute d’environ 30 m sur la rivière du Moulin, il possède toujours son aspect et ses mécanismes d’origine. Sa visite à coût modique (4 $) en vaut le détour! De retour sur la 362, nous prenons la direction de Saint-Irénée, le pittoresque village bâti dans une succession de côtes! À la sortie du village, notre « guide » fit une toute petite erreur d’aiguillage comme il l’a si bien dit… En empruntant un raccourci (le rang Sainte-Madeleine) afin de nous rendre plus rapidement à La Malbaie, il oublia de fourcher à droite à l’embranchement du rang Saint-Pierre et nous nous sommes retrouvés… au milieu de nulle part sur un chemin en gravier. Après environ 4 km, nous décidons de faire le point à savoir si nous continuions ou si nous rebroussions chemin. Après un bref conciliabule (et un regard sur le GPS d’un téléphone), nous décidons de continuer. Sage décision : le pavé réapparaissant effectivement 4 km plus loin au carrefour de la 138 que nous emprunterons. Fini les raccourcis! Nous filons donc jusqu’à La Malbaie où nous traversons la rivière du même nom pour mettre le cap sur Saint-Siméon. La route devenant plus dégagée, le trafic des vacanciers se transformant en circulation plus locale, nous arrivons rapidement à destination où nous nous arrêtons pour faire le plein à la première station-service que nous rencontrons à l’entrée du village. L’idée d’une randonnée avec destination improvisée avait été approuvée par tous, mais lorsque l’option de prendre le traversier pour nous rendre à Rivière-du-Loup est envisagée, les volontaires, un peu comme chez les Romains dans les aventures d’Astérix, se font rares… Nous rebroussons donc chemin, direction la fromagerie de Saint-Fidèle dont la vue, à l’aller, avait ouvert les appétits des friands de fromage en grains et/ou de crème molle! Étrangement, je me retrouve en tête de peloton lorsque dans une montée, Bruno semble rouler anormalement lentement. Je me dis qu’il doit converser avec sa passagère… J’enroule donc l’accélérateur de ma moto chinoise, la Ducati du Racer me suivant comme mon ombre… Nous arrivons dans le stationnement avec une bonne avance sur le reste du groupe. Bruno et Rosalie n’étaient pas en train de jaser lorsque je les dépassai; il écoutait une sonorité bizarre qui émanait de son boxer. Lors des montées, l’effort demandé au flat twin faisait en sorte que le tensionneur de chaîne de distribution émettait des bruits peu rassurants. Il devra donc faire le retour à Sherbrooke à vitesse légale… N’ayant pas eu l’occasion de prendre d’autres clichés depuis le début de l’après-midi, nous mettons le cap (sans jeu de mots) sur la marina de Cap-à-l’Aigle qui devrait nous fournir les décors pour nos dernières photos. Avec sa splendide vue sur mon Kamouraska natal, l’endroit est parfait pour faire les clichés de ma monture chinoise et aussi pour la photo de groupe avec les motos. Mais qui dit session de photos dit demandes spéciales de la part de mon photographe… comme celle d’amener la moto plus loin sur le quai, même si cela implique de descendre des marches avec ladite moto… Pour la descente, sous les conseils de Guy : « Souviens-toi de nos leçons de trial Marc! », le tout se passa sans anicroche. Une fois les clichés pris, il fallut remonter ces fameuses marches. La TK ne disposant pas de la généreuse garde au sol d’une Gas Gas, nous avons dû improviser un pont de roches… Avec un peu d’huile à bras et bien des observateurs, la CFMoto revint à son point de départ sans égratignures…  

Le retour à Québec se fit par petits groupes : Guy un peu pressé de retrouver sa douce prit les devants et disparut à l’horizon. Michel et Marc décidèrent d’aller en reconnaissance de nouveaux emplacements pour une prochaine session de photos dans ce beau coin de pays. Bruno et Rosalie nous suivirent sur quelques kilomètres avant de disparaître eux aussi, le pilote ménageant sa mécanique aux bruits incertains… Isabelle a bien aimé sa journée (environ 400 km) sur sa petite SV d’emprunt. Le confort, pour lequel elle avait des appréhensions avant le départ, ne lui a pas fait défaut. À vitesse de croisière, le vent soulage les poignets et permet une position sportive, mais pas aussi extrême qu’on pourrait se l’imaginer. Pour ma part, je considère cette randonnée, sans prétention, comme un succès. La belle température, des amis avec qui rouler fut un réel plaisir et des routes remplies de paysages comme seul Charlevoix peut vous en donner. L’an prochain, notre virée sera dans la région de… Et puis non! Ce sera une surprise!

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