Un troisième modèle tricylindre pour MV. Même moteur extraordinaire, mais une machine au tempérament différent.
« Ils sont en position de faiblesse ces temps-ci ». Quand j’ai entendu un haut placé de MV Agusta me dire ces mots lors du lancement de la Rivale 800, ça m’a pris un moment avant de comprendre. « Vous voulez dire Ducati? » Il s’est appuyé au fond de sa chaise et il m’a fait un long signe de la tête qui voulait dire : oui et on va les avoir. Il ne m’a pas tout à fait convaincu, mais j’ai apprécié son optimisme.
La production annuelle de MV (autour de 10 000 motos) n’a absolument rien à voir avec celle de Honda (plus de 20 millions) et elle est encore loin de celle de Ducati (40 000). Pourquoi tant d’optimisme, alors? Parce que les choses vont plutôt bien sur le marché intérieur. En Amérique du Nord, par contre, Ducati est encore loin devant. Que faire? La Rivale est un bon point de départ.
À l’époque où Harley-Davidson était propriétaire de MV Agusta (eh oui!), la firme américaine avait beaucoup investi pour le développement des tricylindres qui sont maintenant au cœur de la gamme de MV. Or, qu’ils propulsent la F3, la Brutale ou la Rivale, ces moteurs sont des petites merveilles.
Nous quittons notre camp de base près de Nice, en France, et nous nous dirigeons vers les montagnes. Dans les lancements de presse, les manufacturiers essaient souvent de nous convaincre que leur nouvelle machine comble un tout nouveau sous-créneau jamais exploité auparavant (« un nouveau crossover de poids moyen » dans ce cas-ci…). Voilà entre autres pourquoi ça fait du bien de prendre la route… Dans le passé, on a souvent critiqué, avec raison, la réponse saccadée de l’accélérateur des MV. Mais sur nos Rivale, la réponse est fluide et sans à-coups. Cela peut s’expliquer par des améliorations à la cartographie moteur (selon MV), par le fait que MV a pris le temps de soigneusement calibrer nos machines d’essai (mon hypothèse) ou un peu des deux (ce qui est sans doute le plus vraisemblable). Quoi qu’il en soit, l’amélioration est remarquable. L’accélérateur a perdu son côté explosif et le gain de civilité est bienvenu.
La Rivale a un look sport hérité des autres 800 de la famille, mais plus je roule sur les petites routes en lacets, plus je réalise que c’est une machine souple et polyvalente. Quand on prend une moto sport, qu’on la dénude et qu’on y installe un guidon plus large, on se retrouve souvent avec un roadster à la suspension plutôt ferme (c’est le cas de la Brutale). Par contre, les supermotards, elles, puisent plutôt leurs origines du côté des motos hors-route. La Rivale est donc munie d’une suspension à course passablement généreuse (150 mm à l’avant; 130 mm à l’arrière), ce qui la rend étonnamment pratique sur les routes en mauvais état. Voilà donc une MV fonctionnelle pour nos routes défoncées.
À tous les régimes, et peu importe le rapport sélectionné, le tricylindre de 798 cc tire avec force. À mesure que l’heure du lunch approche, je pense de moins en moins à changer de rapports, et de plus en plus à la ratatouille, mais ça ne change presque rien à ma vitesse, la Rivale est aussi rapide même si je ne fais pas hurler le moteur à plein régime. La puissance maximale affichée est de 125 chevaux à 12 000 tr/min, mais le couple maximal est livré à 8600 tr/m et, dès les 4000 tours, la cavalerie arrive au rendez-vous. Le freinage est tout aussi impressionnant grâce aux étriers Brembo à montage radial. Malheureusement, par contre, ils ne sont pas munis de l’ABS. L’antipatinage offre huit niveaux d’ajustement et on peut choisir entre trois modes de livraison de la puissance (Sport, Normal, Pluie), plus un mode à paramétrer soi-même. On peut également ajuster d’autres paramètres (notamment le limiteur de régime, la courbe de couple et la réponse du frein moteur), mais à mon avis, on devrait remplacer tout cela par un système ABS, surtout pour une moto qui risque de ne jamais être utilisée en circuit.
Si vous n’êtes jamais monté sur une moto de hors-route moderne, la position de conduite de la Rivale vous surprendra peut-être. Avec sa selle à 881 mm (près de 35 po) du sol, on a une vue plongeante sur le trafic. Ajoutez à cela le fait qu’on est assis passablement vers l’avant, comme le veut le style supermotard, et vous aurez besoin d’une petite période d’adaptation. Cela dit, la moto est confortable, l’espace pour les jambes est généreux et la selle est plutôt souple. Et sur la route, la position de conduite avancée nous fait sentir que le pneu avant est solidement planté sur l’asphalte. En fait, pendant le développement de ce modèle, sa nature sportive est devenue de plus en plus évidente et les ingénieurs ont décidé d’opter pour des pneus plus mordants, des Pirelli Diablo Rosso II.
Au niveau esthétique, le designer Adrian Morton a conservé la signature visuelle de base caractéristique de la famille des MV Agusta tricylindres. Mais la Rivale (16 995 $) se distingue notamment par son phare avant, son petit saute-vent et ses caches latérales légèrement bombées.
Après une longue et agréable journée de randonnée, je me suis dit que la Rivale ferait une bonne moto de tourisme avec des valises et un carénage un peu plus grand. Quand j’ai fait part de cette réflexion à un représentant de MV, il m’a regardé avec un drôle d’air. J’ai réalisé ensuite que c’était parce que j’ai un don de prémonition. Peu de temps après ce lancement, MV a dévoilé un modèle appelé Turismo Veloce, et un autre à l’appellation sans équivoque, la Dragster (voir l’encadré).
MV a beau avoir Ducati dans sa mire, il lui reste beaucoup de route à parcourir. Ducati a mis des années à établir un réseau de concessionnaires solides au Canada, et à convaincre les motocyclistes qu’il y avait plus d’avantages que de désavantages à rouler sur une machine italienne. Les motos de MV Agusta sont à la hauteur, mais ce n’est que le début de l’histoire.
Le tricylindre de 798 cc propulsera deux autres modèles : la Turismo Veloce et la Dragster
Je ne suis pas le seul à m’être dit que la Rivale pourrait faire une bonne moto de tourisme. La Turismo Veloce de base conserve l’excellent tricylindre de 798 cc. Avec la version Lusso (pour luxe), on gagne notamment des valises d’une capacité de 60 litres, un système de navigation GPS, des poignées chauffantes et une suspension Sachs semi-active, semblable à celle des Ducati Multistrada. Arrivée prévue au Canada en 2015.
Si la Turismo Veloce joue sur le terrain de la Multistrada, on peut dire alors que la Dragster est une Diavel « light ». Construite en partie autour de la Brutale, cette machine est munie d’un pneu arrière costaud (200/50) mis en valeur par un garde-boue et un train arrière tronqués. Visuellement, on dirait qu’elle est plus longue, mais son empattement est identique à celui de la Brutale. Comme toujours chez MV Agusta, l’électronique est omniprésente et, sur ce modèle, l’ABS est de série, comme il se doit. Disponible maintenant, moyennant 15 995 $.