Parfois, on a besoin de solitude, parfois on a besoin de compagnie. Le défi, c’est de savoir quand il nous faut quoi.
Je suis arrivé en retard pour souper en cette belle soirée du mois d’août. J’avais roulé toute la journée sur la Honda VFR1200DCT à transmission automatique sur la Cabot Trail, en Nouvelle-Écosse. J’étais avec Rob Harris et Dustin Woods, deux autres journalistes moto. Rob roulait en CBF1000 et Woods avait une autre VFR.
Pour moi, la Cabot Trail, a été une révélation. De belles grandes courbes, des paysages magnifiques, et le bleu spectaculaire de l’Atlantique qui disparaît et réapparaît du côté droit. Une journée de moto parfaite, comme on en vit seulement quand la route est exceptionnelle et qu’on se sent particulièrement serein.
Mais il y a eu un petit imprévu : j’ai manqué d’essence… Je savais que les VFR étaient gourmandes et que leur réservoir était petit. Mais je me suis trop amusé à faire des essais avec la transmission, notamment pour voir comment elle réagissait quand on faisait monter le régime moteur de façon excessive… Si bien qu’après seulement 225 km, le réservoir a rendu sa dernière goutte d’essence. La plus proche station-service était à 40 km. Woods me suivait derrière et il s’est bien sûr arrêté quand il m’a vu me ranger au bord de la route. Mais Rob était loin devant et ça lui a pris un bon moment avant de réaliser que nous n’étions plus là. Quand il est revenu, il était très nerveux : « J’avais peur que vous vous soyez plantés ». Eh ben non, c’est juste moi qui n’ai plus d’essence…
Alors je suis monté avec Rob et j’ai profité de la vue sur le siège arrière de la CBF1000 jusqu’à notre auberge, le Island Sunset Lodge, à Margaree Harbour. Quand nous sommes arrivés, tout le monde était déjà à table. Honda avait invité des journalistes moto à cette promenade et c’est la compagnie qui fournissait les jouets : des autos, plusieurs motos, et même quelques tondeuses à gazon… Nous étions une quinzaine en tout (dont Costa Mouzouris, un ancien de Moto Journal). La serveuse se promenait entre les tables avec des grands plateaux remplis de homards.
Je suis allé m’asseoir à une table libre avec mes deux compagnons. Rob a commandé un plat végétarien parce qu’il n’aime pas les viandes industrielles. Quant à moi, je suis rébarbatif à l’idée de jeter un animal vivant dans l’eau bouillante, alors j’ai pris un plat végétarien aussi. Woods, lui, semblait très heureux à l’idée de manger du homard.
Vers la fin du repas, la serveuse est venue lui parler : « Il reste un homard. Le voulez-vous? » Mon repas végétarien n’aura pas servi à sauver un homard, finalement! Alors, malgré les protestations de mon compagnon, j’en prends la moitié. Tant qu’à l’avoir ébouillanté, aussi bien y goûter… Pas extraordinaire à mon avis. Par contre, le repas végétarien était excellent.
Le lendemain matin, ma VFR était de retour. Quelqu’un de chez Honda était allé la chercher et elle m’attendait sagement, avec un beau réservoir tout plein.
Lincoln, Maine, au sud-ouest de Fredericton. Quatre jours plus tard.
Je m’arrête en face de l’école Webbers Mill, un joli bâtiment rouge construit en 1891. En prenant ma caméra, je remarque quelque chose d’étrange : une bouteille d’eau en plastique qui dépasse en-dessous de mon sac de sport. En y regardant de plus près, je réalise qu’une des coutures a cédé et que mes objets personnels ont commencé à s’échapper par là… Je ne me souviens pas exactement de ce que j’avais mis là-dedans, mais je ne tarderai pas à le découvrir. Le soir au motel, dans le petit village de Canaan, à l’ouest de Bangor, dans le Maine, je m’aperçois que je n’ai plus le chargeur pour mon MacBook Pro. Sans chargeur, je pourrai travailler seulement jusqu’à ce que la batterie se vide. Et si je ne peux pas travailler, je ne saurai pas quoi faire…
Car je ne me sens pas très bien depuis que je suis seul sur la route. Après trois jours avec Rob Harris, j’étais emballé à l’idée de faire un bout de voyage en solo, de choisir mes propres itinéraires, d’arrêter quand je veux. Mais maintenant, après une journée sans compagnie, je me sens dérouté, perdu, comme si j’avais oublié qui je suis et comment être moi-même. J’ai réalisé tout cela après coup seulement. Sur le moment, je me sentais juste vaguement mal.
Pour briser ma solitude, le MacBook est utile. Il me permet de prendre mes courriels, de regarder mes photos, de travailler au texte de ce reportage. Mais maintenant, la batterie faiblit et si je ne trouve pas de solution, je vais être obligé de passer la soirée à regarder la petite télé sordide de ma petite chambre de motel sordide. Alors je vais emprunter les pages jaunes au bureau du motel et je trouve un magasin, à Augusta, qui a un chargeur en stock, au coût de 100 $. Par contre, il ferme dans une heure, et il est à 45 minutes d’ici.
La circulation est fluide sur la 95 Sud et je roule un peu plus vite que les autres véhicules. En théorie, j’ai assez de temps, mais il peut y avoir des imprévus, je peux avoir de la difficulté à trouver le magasin, il peut y avoir des embouteillages. Alors j’essaie de prendre un peu d’avance. À un moment donné, je roule dans la voie de gauche, derrière une auto bleue au comportement erratique. Le conducteur se déporte vers l’accotement de temps en temps puis il corrige. Je me dis qu’il doit être à demi endormi ou en état d’ébriété. Dès qu’il se range à droite, je décide de le dépasser. En jetant un coup d’oeil par la glace latérale, je vois un homme à l’air sévère, mais il n’a pas l’air endormi. Dès que j’ai terminé la manoeuvre de dépassement, je vois dans le rétroviseur des phares qui s’allument en alternance. Je viens de dépasser un véhicule de police…!
L’homme à l’air sévère est en réalité une femme à l’air sévère… Je lui explique que je l’ai dépassée parce que je pensais que le conducteur était en état d’ébriété. Elle me répond que c’est parce qu’elle me surveillait dans son rétroviseur. Je lui présente les papiers, elle me demande à qui appartient la moto. Je lui dis que c’est une VFR1200 2010, qu’elle appartient à Honda Canada et je suis un journaliste en train de préparer un reportage. « Ah, vous testez des motos! » qu’elle me dit. Puis elle retourne à son auto pendant que j’attends.
Je suis en train de me demander si ça vaut encore la peine de maintenir mon plan, compte tenu que ça va me coûter 100 $ pour le chargeur, plus peut-être 200 $ pour l’excès de vitesse. Quand elle revient, elle me remet le billet et ajoute « Je vous ai donné seulement un avertissement ». Puis elle examine la moto et au bout d’un moment elle me demande : « Si vous testez des motos, comment ça se fait que ce n’est pas un modèle 2011? ». Sa question était intelligente. Elle a souri, puis elle est retournée à l’auto. Elle a attendu que je démarre puis m’a suivi une minute ou deux. Ensuite, elle m’a dépassé et elle est disparue.
Finalement, je suis arrivé à temps au magasin, j’ai acheté le chargeur et j’ai ouvert mon logiciel de courriels dès que je suis revenu au motel. Personne ne m’avait écrit.
Woodsville, New Hampshire, près de la frontière du Vermont. Deux jours plus tard.
Je n’ai jamais vu une chambre de motel aussi petite que celle-là… Le lit occupe presque toute la pièce et il n’y a pas de meubles pour mettre mes bagages. J’ai dû les déposer par terre. Mais les propriétaires sont gentils. Ils m’ont salué de la main quand je suis parti ce matin. Dès que je quitte la ville, je roule sur une belle petite route sinueuse, je traverse un pont et je poursuis mon chemin dans un très beau décor champêtre. Sauf qu’au bout d’une heure, je suis obligé d’arrêter parce que je n’arrête pas de penser à mon iPod. Est-ce que je l’ai oublié au motel? J’ai écouté de la musique dans le lit avant de m’endormir hier, et je ne me souviens pas l’avoir récupéré ce matin.
Je voudrais bien revenir sur mes pas, mais je ne sais pas comment parce que j’ai roulé sans carte routière depuis ce matin. Pourquoi? Quand j’ai quitté Rob il y a quelques jours, il m’a demandé de suivre une route en particulier et de prendre des photos en chemin. Il avait besoin de ces photos pour illustrer un article qu’il veut publier sur son site Web. Mais si je suis ici aujourd’hui, c’est parce que c’est Moto Journal qui paie mes frais. Ils vont même me donner de l’argent pour ce texte s’ils le trouvent assez bon… Alors j’ai un problème de conscience.
Hier, j’ai commencé à me dire que c’était contraire à l’éthique professionnelle de faire ces photos aux frais du magazine, et que je n’aurais jamais dû accepter la demande de Rob, même si je l’aime bien. Puis en me couchant, ma décision était prise : je ne regarderai pas la carte routière. Je roulerai grosso modo vers l’ouest, puis je tournerai à droite après quelque temps, ce qui me ramènera inévitablement au Canada un jour…
Revenons maintenant à mon iPod. Sur le bord de la route, je fouille dans les (excellentes) valises de la VFR et je ne le trouve pas. J’ai fait beaucoup de zigzags depuis ce matin, j’ai tourné un peu au hasard à droite ou à gauche, alors je ne sais pas trop quoi faire. Finalement, je trouve quand même une façon de revenir à mon fameux motel, une heure plus tard. Les propriétaires sont toujours aussi gentils. Ils me laissent fouiller dans la chambre, ils s’informent auprès de la femme de ménage, ils vont même jusqu’à examiner les draps un par un dans la salle de lavage. Puis je retrouve mon iPod, dans mon sac de sport attaché sur la selle arrière… Même à ce moment-là, les propriétaires sont encore gentils. Et moi je m’excuse pour tant de bêtise.
Après avoir flambé une demi-journée à essayer de retrouver un iPod que je n’avais pas perdu, je me dis que, finalement, je ne réussirai peut-être jamais à retourner en Ontario sans carte routière… Alors je reprends la carte marquée par Rob, mais je décide de ne prendre aucune des routes qu’il a indiquées. Tant pis si je rate des paysages de rêve, mon sens moral est plus fort que tout…!
Glover, Vermont. Un peu plus tard ce jour-là.
Glover est un tout petit village. Et dans ce petit village, il y a un magasin général défraîchi et pour le moins typique appelé The Wooden Spoon. On y vend de la pizza, de l’alcool, des cigarettes et un peu de tout. Devant, il y a un balcon couvert où on peut s’asseoir pour fumer ou manger. Sur une des marches qui mènent au balcon, je vois une pipe en épi de maïs. Elle a l’air abandonnée là, mais en y regardant de plus près, je constate qu’il y a du tabac dans le foyer. Je la prends dans mes mains et j’entends une voix qui dit : « Vous pouvez l’essayer si vous voulez… ».
La voix venait d’un homme sur le balcon. Avec sa salopette et son chapeau mou, il a une allure très particulière, mais il s’intègre parfaitement au décor du vieux magasin général… Je lui dis que je n’ai jamais vu une pipe comme ça auparavant et je lui demande si le foyer est vraiment fait avec un véritable épi de maïs. Il m’a regardé drôlement – c’était à son tour de me trouver étrange. Ensuite, je lui ai dit d’où je venais et il a commencé à me parler des endroits qu’il avait visités au Canada. Moi je l’imaginais vivre dans une cabane de bois dans la forêt avec un poêle qui fume à l’année longue, et manger des poissons de son ruisseau et des plantes étranges d’un marais avoisinant… Mais il m’a parlé de ses voyages, du nord de l’Ontario, de la Colombie-Britannique. Brève et belle rencontre. Je lui ai souhaité bonne journée et quand j’ai repris la route sur la moto, je me sentais bien.
La police encore à mes trousses, Philadelphia, New York. Le lendemain.
Quand j’ai aperçu les gyrophares une fois de plus dans mes rétroviseurs, je ne m’étais pas du tout rendu compte que je venais de franchir les limites d’une municipalité. Il me semble que la route se poursuivait, tout simplement, le long des champs. Je me suis rangé sur le côté et cette fois, j’avais l’impression que je ne m’en sortirais pas. Un jeune homme en uniforme de police municipale descend de son auto et ne demande si je sais pourquoi il m’a arrêté. Il a l’air en colère. Je roulais à 58 dans une zone de 30, qu’il me dit. Une minute plus tard, une auto de la police d’État arrive derrière. C’était une femme, et les deux policiers entrent dans le même véhicule pour me préparer une solide contravention. En me la tendant, le policer me dit : « On en remet des comme ça aussi souvent que possible », ou quelque chose du genre.
L’Ontario et l’État de New-York ont une entente de réciprocité pour les contraventions. Au retour chez moi à la fin de ce prériple, je suis allé voir un spécialiste de la chose, et, pour 500 $, il a fait changer mon billet d’excès de vitesse en dépassement non autorisé. Puis le juge de Philadelphia m’a chargé 100 $ pour ce geste de désobéissance civile, ce qui semble raisonnable, tout bien considéré.
Après avoir déboursé le montant pour la contravention et pour l’expert en contraventions, je me suis résigné et j’ai réussi à passer à autre chose sans trop de difficulté. Mais sur le coup, j’étais passablement moins philosophe… Je venais de me faire arrêter par non pas un, mais deux policiers à la fois et, à ce moment-là je ne savais pas trop combien tout cela allait me coûter. En plus, il me restait pas mal de kilomètres à parcourir avant de renter à la maison, j’étais fatigué et je ne savais pas exactement où j’étais.
Plus tard, j’ai traversé la frontière, à Kingston, et je me suis mis à revoir mon voyage. J’avais roulé dans des paysages magnifiques, et je repensais surtout aux petites routes forestières sinueuses du Vermont, aux longues courbes suivies de virages serrés, aux vallées, aux rivières, aux lacs du Nord-Est des États-Unis.
Puis me sont revenu en tête les points de vue spectaculaires de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick. J’ai aussi repensé à ce motel qui offrait un souper avec menu du 18e siècle, et tenue vestimentaire à l’avenant. L’idée d’un tel souper me laissait absolument froid au départ, mais j’ai laissé Rob m’entraîner. Je revois aussi une femme, francophone, qui voyageait seule sur sa SV650 et qui a placoté quelques minutes en souriant avec notre trio d’Anglos. Et cet Américain qui m’a offert de payer mon déjeuner parce que le restaurant n’acceptait pas les cartes de crédit ni l’argent canadien. Et un groupe de jeunes qui avaient organisé un lave-auto pour financer des activités scolaires et qui se sont beaucoup amusé à laver une moto Honda toute rouge et toute neuve.
Bien sûr, je n’ai pas oublié l’enchantement des routes et de la mer à la Cabot Trail. Ni la policière rusée qui se demandait pourquoi je ne testait pas un modèle 2011.
Malgré tout cela, je ressentais un sentiment étrange, une impression de futilité. J’ai vu des paysages impressionnants et j’ai fait une foule de petites rencontres qui sont autant de petits soleils dans ce voyage. Mais – je l’ai réalisé seulement après – j’aurais mieux fait de rouler avec un compagnon pour revenir de Margaree Harbour. Je n’aurais pas dû partir seul cette fois-ci.
Une histoire de pouce
Le moins qu’on puisse dire, c’est que Steve Thornton n’est pas tombé en amour avec la transmission automatique de la VFR
Mon pouce gauche est engourdi, mais ce n’est pas de la faute du guidon bas de la VFR (son principal défaut). Je me suis coupé le pouce avec un couteau de cuisine quelques semaines avant de prendre la route. Et il n’a pas retrouvé toute sa sensibilité, ce qui complique la conduite de cette VFR à transmission automatique. Car Honda a jugé que ce serait plus intéressant de changer les vitesses avec le pouce gauche qu’avec le pied, comme on le fait depuis des décennies… Le problème, c’est que ledit pouce gauche a aussi la tâche de commander le klaxon et les clignotants. Il vous faut donc un pouce super multitâche.
Je préfère changer les vitesses manuellement parce que la transmission automatique m’énerve en mode normal (D). Alors, j’y vais manuellement, en utilisant surtout la deuxième et la troisième vitesse. Pour dépasser, quand tout fonctionne comme prévu, un premier coup de pouce enclenche le clignotant, un deuxième commande une rétrogradation, et j’y vais. Mais avec mon pouce engourdi (et l’impossibilité de baisser les yeux parce qu’il y a trop de circulation), il m’est arrivé de klaxonner par erreur, puis de rétrograder de deux vitesses en essayant d’actionner le clignotant. Je me suis alors retrouvé à dépasser un gars en camionnette avec mon moteur qui tourne à 9500 tr/min en première, plus un autre coup de klaxon accidentel. Il a vraiment dû penser que j’étais en ta…
Et il n’avait pas tort. Mais je n’étais pas fâché contre lui, je pestais contre Honda. Cette moto occupe une place importante dans la gamme du plus important fabricant mondial, notamment parce qu’elle est munie d’un double embrayage et d’une transmission automatique à deux modes. Pourtant on dirait que Honda a oublié le gros bon sens en mettant cette gâchette de changement de vitesse au pouce gauche. Il y a une limite à vouloir faire une machine distinctive. Même en y mettant tout la bonne volonté du monde, on risque d’oublier de temps en temps de quel côté il faut appuyer. Et quand le moteur tourne à 6000 tr/min en troisième, le fait de passer la deuxième au lieu de la quatrième peut avoir un impact majeur… Pourquoi Honda n’a-t-elle pas tout bonnement conservé un levier au pied? Trop simple?
Cela dit, l’emplacement de la gâchette de commande ne serait pas si problématique si le mode automatique D était plus utile. Ou, pour parler plus clairement, s’il n’était pas si ridiculement paresseux, si excessivement axé sur l’économie de carburant et si désagréable à utiliser parce qu’il assomme complètement le moteur. En roulant sous la pluie dans un petit village du Vermont en mode D, à 45 km/hm, j’ai noté que le moteur de la VFR tournait à 1500 tr/min, dans le rapport le plus élevé. À ce régime, la moto est loin d’être agréable à conduire, elle avance par à-coups et on dirait qu’elle veut s’arracher elle-même quelques dents d’engrenages de transmission… Et quand on tourne l’accélérateur en pareil cas, d’autres surprises vous attendent : la transmission descend de deux rapports et, bien sûr, le régime moteur augmente de beaucoup. Votre VFR qui se comportait, il y a une seconde à peine, comme un chien malade vient de se transformer instantanément en lévrier de très bonne humeur prêt à sauter sur tout ce qui bouge… Pas très convivial, ni rassurant, surtout sous la pluie.
Pour traverser un village ou rouler tranquillement en ville sans déranger personne, mieux vaut ne pas utiliser le mode D. Plus tard, j’ai pu conduire une VFR normale, avec embrayage et levier de vitesses classique, et elle m’a parue nettement préférable.
Quant au mode S, il est moins désarmant que le D. La transmission ne semble pas aussi obsédée par l’idée de monter en tout temps dans le plus haut rapport possible. De plus, quand on accélère, la transition est plus douce parce qu’il n’est pas nécessaire de rétrograder subitement de plusieurs rapports comme avec le mode D. Mais le mode S fait monter le régime trop haut avant de passer au rapport suivant, surtout pour la ville. Alors, j’ai essayé de m’habituer de plus en plus à la gâchette du mode manuel.
Malgré tout, je dois quand même avouer que la transmission au pouce peut parfois s’avérer amusante. Par exemple, vous pouvez laisser l’accélérateur à fond et changer de vitesse d’un coup de gâchette quand le moteur entre dans la zone rouge, sans jamais refermer les gaz. Et à chaque fois, vous obtenez un power shift qui donne un bon coup dans le derrière!
En mode manuel, soulignons un détail intelligent : si vous ralentissez beaucoup et oubliez de rétrograder, la transmission le fera pour vous, de sorte que vous ne vous retrouverez pas en sixième vitesse à 10 km/h. L’inverse n’est pas vrai : en mode manuel, la transmission ne passera jamais un rapport plus élevé sans l’aide de votre précieux pouce.
Somme toute, je ne vois pas l’intérêt de cette transmission sur une VFR. Quand on décide de s’acheter une moto de 275 kg (600 lb) avec un moteur de 160 ch, on devrait logiquement avoir appris depuis longtemps comment manier un embrayage et une transmission. Et pour la grande majorité des gens, ce maniement est un automatisme extrêmement naturel – beaucoup plus en tout cas que de manipuler une gâchette avec son pouce. Cette transmission démontre la sophistication et le savoir-faire mécanique de Honda, mais elle est bizarre, et peu utile dans la vraie vie…
Un petit truc pour terminer. Costa Mouzouris, un ancien journaliste de Moto Journal, a trouvé une manière de remonter le guidon de la VFR d’environ 50 mm. Il suffit d’enlever la bague d’arrêt en haut des poteaux de fourche, de desserrer les vis de 12 mm, de remonter les poignées, puis de resserrer.