Hyosung GT650R : La petite coréenne qui voit grand…

Par Marc ParadisPublié le

Tu essaies quoi? Une Hyosung? C’est fabriqué par qui? Ces questions me furent posées nombre de fois durant l’essai de la GT650R. Autrefois, le simple fait de mentionner qu’une moto était fabriquée en Corée aurait provoqué une dérision générale. Il est vrai qu’en 2011, une moto qui offrirait le degré de finition et de sophistication d’une Pony n’aurait pas sa place sur le marché… Si dans le domaine de l’automobile les marques Hyundai et Kia représentent des valeurs de plus en plus comparables aux japonaises, dans le petit monde de la moto, il en est tout autrement. Sommes-nous, motocyclistes, plus conservateurs?

Posez la question à Pierre Terreblanche, concepteur du succès instantané (Ducati 916) et ensuite d’un quasi-échec total (Ducati 999). La première étant reconnue mondialement comme l’une des plus belles motos, la seconde, beaucoup plus innovatrice dans son design arriva probablement un peu trop tôt, choquant journalistes et motocyclistes. Hyosung Motorcycles roule sa bosse depuis 1978 comme étant une sous-division du Hyosung Group of Industries. À ses débuts en 1979, la filiale produit des motos Suzuki pour le marché coréen. Dès 1986, le centre de recherche et développement s’établit à Hamamatsu, au Japon. Depuis 2003, la marque a acquis son autonomie et s’est lancée dans la production de plus grosses cylindrées (lire 650 cc) pour se lancer à la conquête du marché mondial. 

Lors de notre essai de la GT250R 2008, nos pilotes essayeurs avaient été un peu déçus par son ergonomie trop sportive et cette critique peut tout autant s’appliquer à la GT650R. Bien que je n’aie pu piloter la première, je peux confirmer que la moto faisant l’objet de cet essai vise les adeptes de sportives mues par un bicylindre qui aime prendre des tours. Plutôt que de cibler les motocyclistes débutants ou novices (marché théoriquement couvert par la 250 cc), la 650 avec son ergonomie presque radicale se démarque des Kawasaki Ninja 650 et Suzuki SV. Le guidon bracelet placé bas et le réservoir plutôt volumineux demandent de s’étirer les bras au maximum pour s’installer sur la machine. Les repose-pieds ajustables en trois positions pourraient améliorer le sort des pilotes aux longues jambes, mais leurs ajustements visent une utilisation sur piste et placent les pédales (et commandes) encore plus haut! Un « débrouillard 50 » pourrait toujours se machiner des supports au besoin… Le rayon de braquage est amplement suffisant bien que la limite soit imposée par la longueur des bras de l’essayeur!

Une fois en marche et après avoir apprivoisé la position de conduite, il est possible de rouler de bonnes distances sans trop souffrir, pourvu que le pilote soit en assez bonne forme physique (ce qui n’est pas toujours mon cas). La protection offerte par le carénage est correcte et on peut reposer ses poignets en appuyant les coudes sur le réservoir pendant les sorties sur l’autoroute. Les vibrations sont présentes (V-Twin oblige) mais pourraient être diminuées en adoptant des pesées plus volumineuses au bout des poignées. En ce qui concerne l’espace réservé au passager, une protubérance à l’avant l’empêche de se rapprocher et la partie arrière n’est pas vraiment utilisable en raison de son étroitesse. Par contre, les poignées de maintien, trop souvent absentes sur les pures sportives, permettent un bon maintien lors des freinages. Les pédales haut perchées confèrent une position recroquevillée et ont tendance à se relever au passage de bosses, ce qui confirme que, comme pour les autres sportives, les passagers sont les bienvenus mais à condition que leur visite soit de courte durée!

Côté style, les avis sont partagés. Personnellement, la livrée noire et blanche avec la touche bleutée ne m’attirait pas vraiment, mais en ce qui a trait à la ligne générale, l’allure m’apparait réussie. L’optique inspirée des Ducati 999 et les angles assez aigus du carénage (à la KTM) lui insufflent un vent de jeunesse qui, combiné à la bonne couleur (lire rouge) ferait facilement tourner les têtes. Les rétroviseurs anguleux complètent le concept tout en affichant une image claire de ce qui se passe derrière. Le bas de la pointe avant du carénage située vis-à-vis la roue étant muni d’un astucieux grillage pour protéger les silencieux des projections de pierres. La nouvelle section arrière intègre des feux à diodes et continue sur le thème angulaire présent partout sur la moto. Pour ce qui est du cadre, l’acier règne là où l’on s’attendrait de voir de l’aluminium. Visuellement, les soudures bien réussies ne font pas du tout bon marché, mais le fait que les tubes soient peints de la même couleur que le moteur (noir) le fait passer inaperçu.

Avec un poids annoncé tous pleins faits de 215 kg (473 lb), on ne parle pas d’un poids plume, mais, comme mentionné auparavant, les débutants aux jambes courtes et peu sûres seraient mieux servis par la GT250R. Cependant, pour les autres, bien que le poids supplémentaire soit réellement là, une fois en route il s’envole comme par enchantement. Pour les suspensions, la fourche inversée de 41 mm ajustable en compression et en détente lui confère une multitude d’ajustements. Bon nombre de machines plus dispendieuses n’offrent pas de composantes aussi performantes. Bien qu’elle soit calibrée un peu ferme à la sortie de l’usine, ceux désirant faire une incursion en piste auront le choix des ajustements. À l’arrière, seule la précharge est disponible et est aussi réglée un peu ferme. Les Bridgestone BT056 donnent un bon feedback même si lors d’une mini-incursion en piste je ne me suis pas senti prêt à attaquer comme sur une R1… Côté freins, les doubles disques de 300 mm avec étriers à quatre pistons s’acquittent très bien de la tâche tout en demeurant faciles à moduler. La poignée présente six ajustements au lieu des cinq habituellement offerts chez la concurrence. À l’arrière, le disque de 230 mm avec étrier à deux pistons travaille bien, il faut dire que je n’utilise le frein arrière que lorsqu’un passager s’assoit sur la moto…

Le tableau de bord qui n’avait pas épaté mes confrères lors de l’essai du modèle 250, l’éclairage verdâtre le rendant difficile à lire,  m’a plutôt impressionné. Disparu, le vert! Il a fait place à un ajustement clair avec une intensité réglable comme sur une automobile. Les feux de détresse sont de série ainsi qu’un centre d’infos complet comprenant jauge d’essence, horloge, etc. Le compte-tours est quant à lui analogique, ce qui est un bon choix car plus facile à lire en piste. L’indicateur de vitesse m’a semblé quelque peu optimiste, affichant 126km/h alors que le GPS me donnait à 118 km/h. À cette vitesse, le petit moulin tournait aux environs de 5 000 tr/min tout juste prêt à bondir. Pour profiter de toute sa puissance, il est souvent nécessaire d’enrouler deux fois la poignée.

Est-ce dû au fait que je venais de tester des motos plus puissantes et disposant de plus grandes cylindrées? Une chose est certaine, une fois le deuxième tour de poignée complété, le moteur se réveille et nous gratifie d’un ronronnement plus inspirant provenant du Twin à 90 degrés. Pour les occasions demandant plus de punch, l’excellente transmission permet de rétrograder d’un ou deux rapports sans rechigner. On pointe régulièrement le manque de finition lorsque l’on parle des produits orientaux fabriqués hors du Japon. La GT650R n’y fait pas exception. Sous la selle, le boîtier électronique n’est tout simplement pas fixé. Ceci ne constitue pas un véritable drame, mais un simple boulon aurait donné une tout autre impression…

Lors d’une séance de photos, en accélérant dans les rues du Vieux-Québec, un nuage de fumée se dégagea du moteur. Après une inspection sommaire, le joint d’étanchéité du couvercle de l’embrayage parut être le fautif. Ne voulant pas endommager la moto et désirant aussi ménager mes cuirs, je communiquai donc le pépin aux gens de National Motorsports, les distributeurs de la marque au Canada. Deux jours plus tard, la moto était de nouveau disponible, la pièce à 10 $ ayant été changée. En fait, le joint semble avoir été pincé à l’assemblage, laissant passer un mince filet d’huile. Est-ce que cet épisode a miné ma confiance en la marque? Je dirais que le professionnalisme et la rapidité d’exécution du conseiller technique, de même que le fait d’avoir vu une autre GT datant de quelques années se faire malmener en piste par le même conseiller me rassura. Pour la suite de l’essai, aucun problème ne fut noté.
 
Vendue à un prix de détail suggéré de 7 895 $ (100 $ de plus pour les modèles deux tons), la GT650R se compare avantageusement à la Ninja 650R à 8 699 $ et à la SV650 (qui offre l’ABS de série) à 9 499 $. Bien que loin d’être parfaite, la coréenne arrive avec une garantie de deux ans, kilométrage illimité, et une certaine dose d’exclusivité. Avec l’entente ratifiée aux États-Unis entre les concessionnaires Harley-Davidson et le constructeur ATK qui proposera la gamme des motos Hyosung sous l’appellation ATK chez plusieurs d’entre eux. La petite coréenne constitue-t-elle un meilleur achat qu’une Buell Blast, qui disons-le se détaillait plusieurs milliers de dollars de moins, mais avec laquelle le propriétaire atteignait souvent trop rapidement les limites de la moto? Dans le coup ou pas, la GT650R dans sa livrée rouge pourrait faire rougir d’autres bicylindres plus exotiques pour une fraction du prix.

Caractéristiques :
MODÈLE:        Hyosung GT650R 2010
PRIX:              7 895 $ /7 995 $ deux tons
MOTEUR:        2 cylindres en V DACT , quatre soupapes par cylindre refroidi par liquide
PUISSANCE (à la roue):    72,7 chevaux à 9 250 tr/min
COUPLE (ANNONCÉ): 44,8 lb-pi à  7 500 tr/min
CYLINDRÉE:     647 cc
ALÉSAGE ET COURSE: 81,5×62 mm
ALIMENTATION:    IEC
TRANSMISSION:    Six rapports à entrainement final par chaine
SUSPENSIONS:    Fourche inversée 41 mm ajustable en compression et détente; monoamortisseur ajustable en précharge.
EMPATTEMENT:    1 435 mm
INCLINAISON / TRAÎNÉE:    25,5degrés / 74 mm 
FREINS:        2 disques avant de 300 mm avec étriers à quatre pistons; disque arrière de 230mm avec étrier à deux pistons.
PNEUS:        120/60-ZR17 devant; 160/60-ZR17 derrière
POIDS EN CONDITION DE MARCHE: 220 kg (485 lbs)
HAUTEUR DE SELLE: 830 mm
RÉSERVOIR DE CARBURANT: 17 L
CONSOMMATION:    5,12 L/100 km (55,2 m/gal)  
AUTONOMIE:        338 km
Durée de l’essai: 1100,1 km

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