Les Godier Genoud roulent encore!

Par Moto JournalPublié le

Laurent Humbert, un abonné d’outre-Atlantique, plus précisément de Vulbens (Haute-Savoie), nous envoya un jour une réponse pour le concours du pilote mystère. Laurent avait bien identifié Fast Freddie Spencer, mais avec plus d’un mois de retard sur notre gagnant! Qu’à cela ne tienne, le sympathique motard franco-suisse me proposa un texte sur son voisin, un certain Alain Genoud. Je ne sais pas pour vous, mais dans mon cas, l’évocation de ce nom me sonna quelques cloches. En fouillant dans mes livres de motos, mes fiches et sur le web, je retrouvai facilement des photos, résultats de courses et même des modèles de route modifiés par ce nom mythique de la moto française. Je laisse donc Laurent nous raconter sa version des fameuses Godier Genoud.
Marc Paradis

À l’aube de mes 12 ans, je nourrissais secrètement une idée… celle d’avoir une moto. Je n’avais pas les moyens financiers pour un abonnement à un journal spécialisé qui aurait pu assouvir un peu mes rêves, cependant, je savais qu’à une dizaine de kilomètres de chez moi, un petit garage qui était porté sur la compétition existait.

Aussi, je décidai de partir en douce avec mon vélo en prétextant à mes parents une visite chez un ami…

Après un périple qui me donna la sensation d’être à des lustres de la maison, j’arrivai enfin.

Je rencontrai Alain Genoud, qui se demandait ce qu’un môme de cet âge faisait dans son magasin où trônaient des machines qui, déjà, me faisaient rêver, en l’occurrence des Kawasaki Z et surtout, plus tard, la mythique 1135 GG (Godier-Genoud).Je lui expliquai mon désir et il finit par se prendre d’affection pour le minimotard en herbe que j’étais. Par la suite, il m’emmena sur des machines, dont un petit sidecar…

À l’heure où les mômes de mon âge allaient jouer à des jeux plus en adéquation avec l’enfance, moi je vivais mes rêves.

Mes expériences allaient en grandissant et chaque fois que je pouvais suivre les exploits d’Alain et Georges à la télé, les quelques poils que je pouvais avoir à l’époque se dressaient : moi, je pouvais toucher la moto qui allait donner une coupe à Alain et Georges… Imaginez quel effet pour un enfant!

Il faut dire que Godier-Genoud était aussi une marque de machines préparées sur des bases de Kawasaki complètement mises à la sauce GG (moteur, cadre, freins, carénage) avec une entité propre, car les papiers de circulation étaient au nom de Godier-Genoud, ce qui à l’époque, en France, était rare.

En plus de la préparation de motos, GG a une histoire en compétition qui a marqué son temps.Effectivement, moi, du haut de mes presque 12 ans, je venais de mordre à la passion et particulièrement à celle de GG.

Alain et Georges étaient des compères de longue date ayant défrayé les chroniques du monde de la compétition et spécialement celle de l’endurance (Georges décéda quelques années plus tard d’un accident de moto, 1993). L’année 1975 fut l’apogée de leur travail avec le titre de champion d’Europe d’endurance sur une moto concoctée par leurs soins et qui allait devenir la bête noire des circuits.

Petit rappel…En 1972, l’association avec Georges Godier ressemble à un « bulldozer » particulièrement bien réglé. Après avoir terminé 5e aux 24 h de Barcelone et 3e aux 1 000 km de Mettet, ils gagnent les 24 h de Liège qui se courent à Zolder et finissent 2e au Bol d’Or, ce qui les propulse à la première place du championnat et leur apporte donc le premier de trois titres de Champions d’Europe d’endurance. Mais la course reste la course, et après une année 1973 en demie teinte,il faudra attendre 1974 pour reconquérir le titre de Champions d’Europe d’endurance sur la célèbre Kawasaki jaune à cadre Egli (avec une 1re place à Barcelone et aux 1 000 km de Mettet).Arriva 1975 et la fabuleuse Kawa Godier-Genoud à cadre Doncque, qui leur fit retrouver, pour la troisième fois (et deuxième consécutive), leur titre de Champions d’Europe d’endurance.Fin 1975, le tandem Godier Genoud prend une retraite « anticipée » (surtout pour Alain qui, avec une place de 5e en coupe FIM 750 à Barcelone en 1973 derrière Doods, Sheene, Mandracci et Findlay, montrait des signes évidents de pilote de vitesse de haut niveau).

Sans compter les nombreuses courses réalisées pour Kawasaki France qui ont fait participer entre autres Yvon Duhamel pilote émérite qui a marqué aussi ses passages en course d’endurance (1974,1975 et 1976) avec qui Alain a toujours gardé contact.La toute première GG sera conçue sur base 900 Kawasaki Z1 de 1976 puis la Z1000 de 77 et 78.C’était une amélioration de la 900 et de la 1000 mais pas de carte grise Godier Genoud.

Voila pour l’histoire. Le temps s’écoula et mon amitié pour Alain ne s’est jamais éteinte, bien au contraire, les années passèrent, Alain eut la continuité de sa passion qui par ailleurs est la mienne aussi.À ce jour, et avec la compagnie de son préparateur de l’époque (Christophe Talhemard, qui a rendu visite l’été dernier à Yvon Duhamel au Québec), il continue la préparation de moto, machines principalement destinées à des passionnés. Certaines d’ailleurs se retrouvent sur des circuits pour des courses Pro-Classique ou même le moto-tour.

Pour ma part, je n’ai plus 11ans, mais depuis ce jour où je Me suis échappé en vélo, je suis resté aux côtés d’Alain et de ma passion. Petit historique de la machine Godier-Genoud de 1975.Le développement de cette moto a été décidé dès octobre 1974.Le cahier des charges était : une machine plus légère, maniable, meilleure motricité et facilité d’accès pour les interventions rapides en course.

Cela fut fait en collaboration avec Pierre Doncque (ingénieur en mécanique et professeur à l’école d’IUT d’Amiens), également passionné de moto depuis sa plus tendre enfance. La particularité résidait en plus sur une partie cycle innovante (qui par la suite fut reprise par bon nombre de constructeurs) : cadre périmétrique, suspension monoamortisseur avec balancier et biellettes.

Le tout construit par Alain Genoud et Georges Godier dont les dernières mises au point et essais furent effectués en mars 1975, l’année du titre de Champions d’Europe d’endurance.

Yvon Duhamel et Jean-François Baldé roulent à leur tour sur une machine similaire dénommée Godier-Genoud.

À ce jour, Alain construit et rénove des Godier-Genoud (Kawasaki et Godier-Genoud de 1973 à 1990) pour le plus grand plaisir des passionnés du monde entier.

Laurent Humbert

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