Lorsque nous avons choisi la 1125R comme moto d’essai à long terme pour l’été 2009 nous pensions avoir la première de plusieurs Buell modernes à venir. Nous avions tout faux. La fin fut triste. Roulée dans l’arrière d’un camion, notre Buell a disparu doucement pendant que la porte se refermait, comme un rideau en velours rouge après un spectacle. Et quel spectacle ! Notre Buell 2008 fut bien plus qu’une moto qui trainait là pour la saison. Ce fut une relation avec des hauts et des bas, précédant la fermeture de la compagnie.
Après notre bataille pour simplement obtenir la moto (voir le numéro de nov./déc.), notre première fin de semaine fut déjà problématique… Un trajet de deux heures et demie jusqu’au Pary Sound Sport Bike Rally nous a familiarisés avec la moto et a prouvé qu’elle permettait de couvrir des distances substantielles dans un confort relatif. En compagnie d’une KTM950SM et d’une Ducati Streetfighter, la Buell était une monture intéressante avec son moteur Helicon souple et puissant fabriqué par Rotax. Ensuite, les ennuis ont commencé. En arrivant dans une zone réputée pour être fréquentée par les policiers, un coup d’œil au compteur de vitesse numérique révéla qu’il affichait un beau zéro au lieu d’un nombre à trois chiffres qui nous aurait encouragés à ralentir !
Le totalisateur kilométrique a aussi capitulé à 1 280 kilomètres. Pendant le reste du voyage, le compteur de vitesse fonctionnait de manière intermittente, mais il était clair que notre Buell tant attendue devait se rendre chez le garagiste. Pas facile d’apporter une moto pour des travaux sous garantie pendant la pleine saison dans les ateliers de réparation. Pas évident non plus d’apporter une moto sport chez un concessionnaire Harley. Chez le concessionnaire, le responsable du service nous fait savoir que les Buell étaient des pain in the ass pour des mécanos habitués à réparer des Harley à longueur de journée. Elles venaient interrompre une séquence de travail bien rodée. Le problème provenait d’un capteur de vitesse, lequel prendrait deux semaines pour arriver… Nous avons donc signé une déclinaison de responsabilité au concessionnaire pour conduire notre moto sans compteur.
Deux cents kilomètres plus tard, le clignotant arrière droit a cessé de fonctionner (nous avons trouvé le problème nous-mêmes, à savoir un module D.E.L. déficient — remplacé plus tard sous garantie par le concessionnaire). Puis, quelques jours plus tard, le voyant check engine s’est allumé. Selon le manuel du propriétaire, ce voyant signifiait « qu’un évènement relié au bon fonctionnement du système de gestion du moteur s’est produit. » Nous avons stationné la Buell et attendu les pièces commandées. Un mois après notre visite chez le concessionnaire, nous avons reçu un appel nous avisant que les pièces étaient arrivées. Avec un bilan de santé au beau fixe, nous étions de nouveau sur la route quelques jours plus tard, et sans problème pour les 500 prochains kilomètres. Il était temps de se rendre au circuit.
Avec des suspensions totalement ajustables et une paire de pneus Pirelli Diablo Corsa III en monte d’origine, nous avons rejoint le groupe de Pro 6 pour une journée de piste à Shannonville lors d’un jour de grande chaleur. En augmentant le rebond de l’amortisseur arrière, nous avons corrigé un louvoiement qui se produisait dans les grandes courbes, et mis à part cela, la moto fonctionnait correctement. Le disque de frein avant périmétrique inhabituel avec son étrier à huit pistons fournissait un freinage sans fading, expliqué avec discernement par un essayeur : « Je tirais sur le levier et elle ralentissait. » En raison de la connaissance du circuit ou d’une certaine timidité, l’embrayage à glissement limité a rarement été mis à l’épreuve.
La livraison linéaire de la puissance de la Buell rend délicate l’estimation intuitive de sa puissance. Dans notre article introductif, nous avions commis une erreur sur la puissance annoncée (qui est de 146 ch à 9 800 tr/min avec 82 lb-pi de couple maxi à 8 000 tr/min), mais ces chiffres semblaient élevés, ce qui nous a motivés à faire un essai sur le Dynojet de Pro 6. La courbe de couple est plate mais les chiffres réels se sont avérés plus bas. La puissance maxi était de 118,2 ch à 10 385 tr/min avec un couple maxi de 68,6 lb-pi à 6 800 tr/min).
Pour un gros bicylindre en V, la consommation d’essence est bonne. Cette moto a un penchant pour le super et sa consommation a oscillé entre 9 L/100 km dans le trafic du vendredi après-midi et 5,7 L/100 km à des vitesses semi-légales pendant notre virée d’automne, pour une moyenne totale de 6,25 L/100 km. Pendant l’été, nous faisions des prévisions sur les nouveaux modèles possibles dans la gamme Buell qui bénéficieraient d’un moteur plus moderne que les vieux moteurs Harley à culbuteurs. Puis la nouvelle de la fermeture de Buell est arrivée par le bruit que faisait Uwe Watchendorf — qui avait suggéré la Buell comme moto d’essai à long terme — en se frappant la tête sur son bureau… Il avait parié sur un cheval qui ne courait plus !
Maintenant que le fabricant s’est retiré du marché, la question est de savoir si une 1125R à un prix d’aubaine pourrait tenter un acheteur. Un appel chez notre concessionnaire H-D local nous a révélé une baisse de prix drastique. À la mi-novembre, une 2009 1125R qui se vendait auparavant 15 539 $ était en vente pour 9 540 $. Encore mieux, une 2008 invendue était proposée pour 6 900 $, soit seulement 600 $ de plus que la Honda monocylindre 230 cm3 supermotard que nous avons essayée dans notre dernier numéro. Dans un communiqué de presse, Harley-Davidson a annoncé qu’il fournirait encore des pièces détachées pendant sept ans et que ses concessionnaires continueraient à offrir du service. Mais ce sera du service avec un sourire ou avec une grimace ? La 1125R pourrait être une moto de circuit abordable avec un bon confort pour la route, mais l’inconvénient, c’est qu’en cas de problème, il faudra faire face au concessionnaire Harley-Davidson. Il faut bien y penser.