Lorsque Darwin Sveinson se fit offrir la Suzuki GS550T de son beau-frère, il était loin d’être enthousiaste. La moto avait été délaissée pendant 10 ans dans un champ et son expérience lui dictait qu’elle ne vaudrait jamais l’argent requis pour la restaurer. Toutefois, convaincu par son épouse que ce projet de restauration constituerait un défi de taille, Darwin transporta la vieille GS 1981 dans son atelier de Surrey, en C.-B.
Le dessinateur en architecture de 48 ans avait une vision très claire de son nouveau projet. « J’aime beaucoup le look dépouillé et minimaliste des café racers. Je voulais concevoir un modèle qui rendrait hommage aux café racers britanniques de la fin des années 1960, tout en en rehaussant la fiabilité, la rapidité et la tenue de route. »
L’appréhension de Darwin à adopter la GS s’avéra fondée. L’exposition à long terme aux éléments avait rendu la plupart de ses composantes inutilisables. Les seules pièces récupérables étaient le bras oscillant, le cadre, le phare avant, l’instrumentation, l’aile arrière et le filage.
Après avoir soupesé ses options, il décida d’utiliser les éléments de la partie cycle d’une GSX-R1100 1986. La fourche, les freins et la roue avant convenaient, mais le bras oscillant de la GS devait être élargi afin d’accueillir la grosse roue arrière. Il installa des amortisseurs arrière de Progressive Suspension ainsi que des repose-pieds provenant d’une GSX-R750 1989. Une fois le plan esquissé, le moteur, la fourche, le combiné arrière et les guidons-bracelets furent enduits de peinture en poudre de couleur titane par Steve Edwardes, de Rainbow Powder Coating.
Le moteur de rechange fut construit par Dave Sudul, de Supersport Cycle, à Langley, qui agença le carter de GS550 à un bloc de GS650 à alésage élargi. Il ajouta ensuite des carburateurs à coulisse plate Mikuni repris d’une GSX-R750 des années pré-1988 ainsi qu’un échappement 4 dans 1 Mac.
Les autres modifications consistèrent à assembler les conduites de freins tressés, à fabriquer une selle sur mesure et à replacer la batterie à l’endroit où la boîte à air se trouvait auparavant. Dépouillée de 23 kg (50 lb), la moto pèse maintenant un impressionnant poids de seulement 180 kg (395 lb), tous pleins faits.
Darwin, qui est daltonien, sélectionna un coloris « arc-en-ciel » pour le cadre, le bras oscillant et les roues à partir d’un échantillon de peinture recueilli sur une cannette de bière. « On dirait qu’elle est noire jusqu’à ce que le soleil plombe dessus; elle explose alors de couleurs. Les prismes réfractent la lumière en 26 couleurs différentes, ce qui lui donne une allure particulièrement cool quand les roues tournent. »
La conception de ce modèle ne s’est pas faite sans aucune inquiétude. « Dès le début, je me suis dit que cette moto aurait une tenue de route médiocre, mais quelle monture agréable à piloter cette moto se révéla-t-elle ! J’en ai possédé plusieurs au fil des ans, mais celle-ci pourrait bien être la plus emballante. »
Quand on le questionne au sujet des coûts de ce projet, Darwin se met à rire et répond simplement : « Trop ! » Il a d’ailleurs cessé de noter ses dépenses assez rapidement, en philosophant que « mieux valait ne pas le savoir ». « Avoir les reins solides sur le plan financier n’est pas le seul élément garant du succès de la conception d’une moto, prévient Darwin. Vous devez être infiniment patient, car si vous ne l’êtes pas, la construction d’une moto va tout simplement vous rendre cinglé. Aussi merveilleuse que cette moto puisse être, avec mon 1,80 m, je suis beaucoup trop grand. Connaissez-vous quelqu’un court sur patte qui voudrait acheter une moto ? »