La Suzuki GSX-R1000 de Suzuki a été complètement revue, mais a-t-elle conservé l’esprit qui a fait le succès du modèle précédent ?
Beaucoup de choses ont été écrites dans ce magazine et ailleurs au sujet du circuit de Calabogie, Ontario et comme il se compare à celui de Mt Tremblant comme l’un des meilleurs du pays. Aussi bon soit-il, c’est un circuit difficile à apprendre, car beaucoup de virages vous attendent avec une surprise que vous découvrez en arrivant dessus. Des côtes aveugles combinées avec des virages à rayon décroissant font que vous devez avoir confiance dans votre machine et votre sens de la direction, et nous sommes bien heureux de découvrir ce circuit au guidon de l’une de nos machines d’un litre favorite, la Suzuki GSX-R1000.
C’est devenu un rituel annuel de se gratter la tête en se demandant comment les manufacturiers vont encore pourvoir extraire plus de puissance et de performance des machines de classe ouverte. Mais pour la GSX-R nous étions particulièrement curieux de voir ce que la prochaine génération allait nous apporter, car la génération actuelle était l’une de ces rares motos qui semblent tout faire pour tout le monde. Lors de notre dernier comparatif de motos sport de classe ouverte, tout le monde, depuis notre invité essayeur et plusieurs fois champion canadien en course sur circuit Steve Crevier jusqu’aux plus novices avait préféré la Suzuki. Même s’il n’est pas rare qu’une machine domine ses rivales, l’avantage de la GSX-R est qu’elle fonctionnait bien avec des pilotes de différents niveaux. Ce n’était pas une brute qui ne fonctionne bien qu’à 100% et elle était adaptée pour la conduite sur route, pas aussi confortable qu’une Honda CBR1000RR, mais offrant une belle personnalité et un confort raisonnable (évidemment, pour une moto de sa catégorie, soit selon les standards des motos sport).
Commençons par les changements et ils sont nombreux. L’alésage et la course restent à 73.4 x 59 mm, mais les soupapes d’échappement augmentent de 2 mm pour atteindre 26 mm et elles s’ouvrent plus grand. Les injecteurs d’essence sont remplacés par de nouveaux à 12 trous (au lieu de quatre) afin d’offrir une meilleure atomisation de l’essence. Les orifices de ventilation entre les cylindres voient leur diamètre augmenter de 39 à 48 mm afin de réduire les pertes de pompage dans le moteur et améliorer le couple. Les modifications moteur sont accompagnées d’un nouveau châssis et d’un nouveau bras oscillant comptant moins de composantes afin de "rééquilibrer la rigidité" selon le langage technique de Suzuki. Le bras oscillant est allongé de 10 mm, ce qui augmente l’empattement à 1415 mm. L’angle de chasse reste à 23,5 degrés tandis que le déport augmente de 2 mm pour atteindre 98 mm.
Lorsque le rédacteur Costa Mouzouris s’est rendu au lancement de presse l’hiver dernier (Moto Journal, mai 2007) il a piloté dans des conditions déplorables à Philip Island, sous la pluie et les grands vents qui ont finalement fait interrompre les essais. Il n’a donc pas pu avoir une image complète de la moto car il se demandait si le comportement vicieux qu’il avait constaté (incluant un tankslapper au bout de l’une des lignes droites du circuit) était intrinsèque à la moto ou dû aux conditions climatiques. Nous sommes heureux de constater que sous les cieux cléments de l’est ontarien tout s’est bien passé. La moto a conservé la stabilité qui était sa marque de commerce, et en selle elle semble à peine différente de celle de l’an dernier et dans son cas c’est une bonne chose.
Les suspensions sont complètement ajustables et la fourche inversée de 43 mm et le simple amortisseur arrière disposent maintenant d’un ajustement pour la compression à haute vitesse. Les étriers radiaux Tokico pincent des disques de 310 mm et offrent une forte puissance de freinage sans être hyper sensibles comme ceux d’autres motos sport.
En route pour le circuit, nous sommes déçus de constater que la belle sonorité grondante de l’an dernier a malheureusement disparu. Afin de réduire les émissions, l’ancien silencieux unique a été remplacé par un système à deux silencieux plus lourd qui contribue d’ailleurs au gain de poids total de 6 kg par rapport à l’an dernier pour atteindre 172 kg. Nous pouvons accepter un peu de poids supplémentaire au milieu de la moto puisque nous avons le même problème nous-mêmes, mais la perte du plaisir auditif est regrettable. Costa avait désigné le son de l’ancienne machine comme "presque diabolique" tandis que Neil Graham le situait "à mi chemin entre un V12 Ferrari et un petit bloc Chevy."
La grosse nouveauté sur cette moto est le Suzuki Drive Mode Selector (S-DMS), un système qui offre plusieurs plages de puissance. L’un des trois modes de puissance peut être choisi à partir d’un simple bouton accessible au pouce sur le côté droit du guidon. La courbe A donne toute la puissance; la courbe B adoucit la puissance en dessous de 8000 trs/mn mais donne toute la puissance au-delà et la courbe C diminue la puissance sur toute la plage. Lors du lancement de presse, Suzuki a expliqué à maintes reprises que ces trois modes ne sont pas destinés à être (A) circuit, (B) conduite rapide sur route, (C) utilisation générale sur route, mais qu’ils sont tous prévus pour une utilisation sur circuit.
L’un de nos essayeurs, qui souffrait encore de ses blessures provenant de sa participation à une course de la coupe féminine, a immédiatement sélectionné le mode C et l’a conservé pour la moitié de la première journée. La puissance est suffisamment réduite pour que la réponse à l’accélérateur se compare à celle d’une 600. Si vous avez déjà été surpris de constater comment une bonne accélération peut lever la roue avant dans les airs sans crier garde sur une grosse moto sport, vous serez soulagé de savoir que dans le mode C pour pouvez accélérer sans réserve. Une piste sèche sous un beau soleil ne représente peut-être pas les conditions idéales pour ce mode, mais adoucir la courbe de puissance pour apprendre un nouveau circuit peut être une belle application de cette nouvelle technologie. Et malgré ce que les ingénieurs en disent, ce mode semble très adapté pour la conduite sur route, surtout sur les surfaces humides ou mouillées dans des températures fraîches.
Alors que les modes A et C ne requièrent pas plus d’explications, le mode B reste un mystère. Il y a une marche brutale dans la courbe de puissance lorsqu’elle rejoint la pleine puissance à 8000 trs/mn. Ce mode est peut-être destiné à ceux qui veulent avoir l’impression de piloter une machine de GP deux temps très pointue. Notre essayeur est surpris lorsque son régime moteur passe les 8000 trs/mn en sortie de virage et que sa moto se redresse soudainement pour se diriger vers l’accotement. Il est possible de la corriger avec une pression sur le côté intérieur du guidon et une réduction de l’accélération, mais on peut se demander quel est le but de ce mode ?
Il faudrait un essai comparatif des deux motos pour voir si celle de cette année est très différente, mais en selle elle semble très comparable à l’ancienne. La réponse du train avant est excellente et le feedback du châssis informe le pilote sur ce qui se passe entre les pneus et la route. La puissance est également disponible à tous les régimes sans creux ni pic. En raison de leur puissance à bas régime, les 1000 sont plus agréables sur la route que leurs petites sœurs de 600 cm3, permettant de dépasser plus facilement sur l’autoroute et de sortir d’un virage avec un rapport ou deux de trop.
Au moment où nous pensons que le développement des motos sport a atteint un sommet, elles réussissent encore à nous surprendre avec plus de légèreté, plus de rapidité et une meilleure tenue de route. Si la nouvelle GSX-R n’est pas meilleure que l’ancienne de manière éclatante, ce n’est pas parce que le progrès est terminé. Cela veut simplement dire que la prochaine génération sera celle qui représentera le gros saut en avant. Mais pour l’instant, la GSX-R1000 est une moto culte pour sa génération, parce qu’il y a peu de motos qui ont autant à vous offrir, que vous soyez un pilote d’usine, un coureur local, un utilisateur occasionnel des circuits ou seulement un pilote moyen qui aime les meilleures motos d’une catégorie. Mais malgré tout cela, notre message aux ingénieurs Suzuki est le suivant: s’il vous plait, va-t-elle se remettre à chanter comme avant ?