Après avoir passé l’été en compagnie de Miss Fazer nous avons découvert une moto performante au look aguicheur, qui fait preuve d’une grande homogénéité et d’une polyvalence au-dessus de la moyenne. Plus radicale que l’ancienne FZ1, elle troque un chouïa de confort contre un surplus de sensualité… Quand la FZ1 est arrivée dans mon garage, au début de la saison 2006, j’avais des tas de sorties en tête. Mais divers problèmes de santé et un calendrier d’essais très chargé ont ralenti mes ardeurs. Je n’ai pas parcouru autant de kilomètres au guidon de la Yamaha que je l’aurais voulu. En fait, plusieurs collaborateurs se sont relayés aux commandes de la FZ1 durant l’été, sans se plaindre de leur sort d’ailleurs. Et je les comprends. Pourtant, quand j’ai eu l’occasion de piloter la streetfighter d’Iwata City, ce fut invariablement avec un plaisir intense. Chaque fois l’expérience s’est avérée magique. La FZ1 offre toutes les qualités que j’attends d’une moto – plaisir et efficacité de conduite, performance, tenue de route, sportivité – sans que ses défauts soient rébarbatifs. Bien sûr, j’aimerais un poil plus de confort, mais dans l’état actuel des choses, je ne serais pas prêt à sacrifier l’équilibre, ni la tenue de la FZ1 pour l’obtenir. La roadster de Yamaha n’est pas une routière au long cours, et n’a jamais prétendu en être une. Ne dit-on pas que la plus belle fille du monde n’offre que ce qu’elle a à offrir ?
Quand la nouvelle FZ1 est apparue sur Internet, à l’automne 2005, son look n’a pas plu d’emblée. Certains l’ont même trouvée banale. Personnellement, je la trouve très sensuelle, cette Yamaha. Fine, élancée et sobre. Elle n’en fait pas trop et n’a pas besoin d’artifices pour briller. Elle garde un certain air de famille avec sa devancière même si elle succombe à la mode des échappements volumineux tronqués et placés bas, à la sauce MotoGP. Son air est nettement plus « méchant », plus streetfighter. Plus radicale, autant au niveau de l’allure que des prestations, elle fait preuve d’un caractère plus sportif. Plus délinquant aussi. Bien qu’elle ne soit pas un monstre de couple à la manière d’une Hayabusa, la FZ1 fait mieux que la R1. En bas de 6 000 tr/min, en sixième, il suffit d’ouvrir l’accélérateur pour se propulser vers l’avant. Pour bénéficier d’une accélération plus solide, il faut descendre un rapport. Les reprises sont bonnes, à tous les régimes, sur tous les rapports. En ville, la souplesse du quatre en ligne est convenable. Il reprend sur un filet de gaz, sans broncher, dès 2 500 tr/min. Les départs rapides sont francs et puissants et l’injection est très bien maîtrisée. Entre 2 500 et 6 000 tr/min, la puissance est linéaire. Mais de 6 000 à 12 000 tr/min, régime où débute la zone rouge, le quatre cylindres tire avec autorité. Les chevaux arrivent au galop. La puissance est impressionnante et la sonorité émise par le silencieux court est enivrante. Les vibrations sont relativement bien maîtrisées dans l’ensemble. Le moteur est monté souple, sur silent-blocks, mais ne dispose pas de contre-balancier. Le guidon est équipé d’embouts vissés destinés à réduire les vibrations. On ressent un peu ces dernières aux alentours de 5 500 tr/min, à vitesse stabilisée, mais sinon elles sont peu présentes.
L’embrayage est précis et requiert un effort léger. Il seconde bien la nouvelle boîte six rapports dont les deux derniers ont été allongés afin d’obtenir une plus grande douceur de roulement à haute vitesse. Cette transmission est souple et les rapports s’engagent simplement et précisément, sans faux point mort. Le demi-carénage équipé d’une bulle non ajustable, plus haute de 17 mm, offre une protection adéquate pour un pilote de 1,78 m et contribue au confort qu’il ressent. On peut maintenir une vitesse de 160 km/h sans devoir se cacher derrière la bulle. La FZ1 atteint aisément 260 km/h au compteur, à fond de sixième, à environ 12 000 tr/min. Les turbulences au niveau du casque sont bien maîtrisées et le niveau sonore est relativement faible. Le poste de pilotage dispose d’une instrumentation complète et facile à lire, spécialement dans le cas du tachymètre analogue. Il inclut également une jauge à essence, une horloge, deux totalisateurs kilométriques et une jauge de température du liquide de refroidissement.
La hauteur de selle de 815 mm est relativement basse. Un pilote de taille moyenne peut facilement poser les deux pieds au sol. Le large guidon à cintre plat offre une bonne préhension et un effort de levier important qui facilite la mise sur l’angle. Les repose-pieds relevés placent les jambes en position repliée, mais offrent une meilleure maîtrise en conduite sportive. Le réservoir à essence de 21 litres de capacité est plus court et place le pilote plus vers l’avant. Cependant, il semble plus large à la base, ce qui nous oblige à écarter les jambes davantage. La selle est relativement bien rembourrée et son confort s’avère correct pour de petites sorties. Au-delà de 200 km, on commence à ressentir des douleurs au postérieur. La position de conduite droite, légèrement basculée vers l’avant, est confortable. Elle favorise un meilleur senti du train avant. La pression sur les poignets et les avant-bras est minimisée. Par contre, on se sent un peu plus à l’étroit que sur l’ancien modèle, spécialement au niveau des jambes. En duo, le passager n’est pas aussi bien traité que sur le modèle original. Je ne suis pas sûr que ma femme m’aurait accompagné en Nouvelle-Écosse, comme passagère, sur la nouvelle FZ1, alors qu’elle l’avait fait sans crainte en 2001, sur le modèle original. En fait, elle a passé très peu de temps derrière la Yamaha, préférant se promener seule, sur son scooter.
Très agile, la FZ1 négocie les enfilades de virages serrés avec facilité et précision. Elle se place sur l’angle d’une simple poussée sur le guidon et reste très stable. Elle change d’angle rapidement et on sent bien le train avant travailler. Dans les grands virages rapides, elle est ultrastable et conserve une trajectoire imperturbable. En sortie de courbe, on sent bien l’appui sur le train arrière et on peut ouvrir les gaz en grand sans risquer une perte d’adhérence. La tenue de route est donc rassurante et s’accorde bien au caractère de roadster sportif que Yamaha a voulu donner à la FZ1. Les suspensions procurent une bonne qualité de roulement. La fourche Kayaba dispose de l’ajustement de la précontrainte et de l’amortissement en phases compression et détente. Une note intéressante, ici : le poteau de gauche contrôle l’amortissement en compression, celui de droite, la détente; une vis de réglage loge au sommet de chacun. Le monoamortisseur est ajustable en précontrainte et en détente.
Sur notre machine, les réglages d’origine des suspensions ont été adoucis en précontrainte du ressort et en hydraulique afin de procurer un roulement plus doux. Avec ces glages, Miss Fazer s’est révélée confortable et précise. Un peu plus sèche que l’ancienne, certes, mais plus sportive et plus affûtée aussi. L’arrière rebondit un peu sur les bosses sans que l’intégrité de la tenue de route en soit affectée pour autant. Le freinage est classique, mais très efficace. Les freins avant (double disque de 320 mm pincé par des étriers monobloc Advic à quatre pistons ) sont puissants et faciles à moduler. Ils offrent une rétroaction correcte, mais demandent une bonne pression sur le levier ajustable. Le frein arrière (disque simple de 245 mm avec étrier à simple piston) est souverain et prévisible. Il permet de dessiner de belles traces noires sur l’asphalte, sans déstabiliser la machine.
Nous avons gardé les pneus radiaux Dunlop D221 Sportmax d’origine (120/70-ZR17 à l’avant et 190/50-ZR17 à l’arrière) durant toute la durée de cet essai à long terme. Après plus de 3 500 km, ils étaient toujours aussi performants et fournissaient une bonne indication du grip disponible ou du travail des suspensions. À aucun moment leur adhérence n’a été prise en défaut. Pas plus sur le mouillé que sur le sec. En fait, ils se sont avérés meilleurs que les Bridgestone qui équipaient les FZ1 que nous avions pilotées lors du lancement de presse en Californie. Ils offraient une meilleure rétroaction et une adhérence plus sécurisante.
D’avril à octobre, la FZ1 nous a accompagnés dans la plupart de nos sorties, toujours prête et disponible. Toujours très agréable à piloter. En dehors d’une vidange et du graissage régulier de la chaîne, nous n’avons eu aucun entretien à faire sur la Yamaha, ni rencontré aucun problème technique. Nous aurions aimé pouvoir installer une selle de remplacement pour vérifier si cela aurait suffi à améliorer sensiblement le confort, mais aucune n’était offerte à l’époque. À part l’ajustement des suspensions mentionné plus haut, nous n’avons pas eu de changement à apporter pour pouvoir apprécier pleinement le roadster des Bleus. Une saison tranquille donc. Toutes les modifications effectuées par Yamaha à la FZ1 confirment son changement d’orientation. Alors que le modèle original jouait la carte de la moto-bonne-à-tout-faire et la plaçait comme une routière sportive, petite sœur survitaminée d’une FJR1300, la nouvelle Yamaha s’est radicalisée et préconise une conduite plus agressive. Plus joueuse, voire délinquante, elle est devenue une véritable bagarreuse des rues, un peu à la façon d’une Kawasaki Z1000 et a perdu un peu de sa polyvalence. Tout l’été durant, nous avons pu apprécier son équilibre, son homogénéité.
Rouler une FZ1, c’est comme posséder une R1 capable de vous mener partout sans vous faire souffrir trop ou vous faire regretter d’avoir jeté votre dévolu sur une sportive. Facile à prendre en main et à vivre au quotidien, elle transforme toute route sinueuse en Tourist Trophy. Et vous donne l’impression d’être un meilleur pilote que vous ne l’êtes en réalité. Mais elle ne peut plus rivaliser avec une Honda VFR800 sur un long voyage. On ne peut pas tout avoir
L’avis des essayeurs
Après une première rencontre manquée en Afrique du Sud, à la fin du mois de janvier 2006 (le lancement auquel je participais a été annulé en raison du décès d’un journaliste italien, sur la route), j’ai pu rencontrer Miss Fazer en Californie, un mois plus tard et passer une fin de semaine en sa compagnie. Attachante, fougueuse et pas farouche pour un rond, elle m’a laissé sa carte de visite et m’a donné rendez-vous à Montréal, au printemps suivant. Pour être franc, je ne m’attendais pas à ce qu’elle me rappelle. Mais quelle ne fut pas ma surprise quand, le 21 avril 2006, en plein milieu d’une journée pluvieuse et triste, je reçus un coup de téléphone qui allait changer ma vie ! Elle me demandait d’aller la chercher chez Alex Berthiaume, sur le plateau Mont-Royal. Elle était libre pour l’été et voulait le passer avec moi. En amoureux ! J’étais bouche bée… et bras pendants ! Le temps d’enfiler un casque, un blouson et des gants – après m’être copieusement aspergé de parfum – et j’étais en route pour mon rendez-vous, haletant. Je ne vous mentirais pas en disant que j’ai passé un été merveilleux, mais, malheureusement, je ne fus pas seul à partager ses faveurs. Presque tous mes collaborateurs ont trouvé le moyen de passer un week-end en tête à tête avec Miss Fazer. Je suis trop bien élevé pour l’avoir questionnée sur ces escapades, mais aujourd’hui, environ un an après les faits, les langues se délient, les témoins parlent et ils nous racontent leurs aventures avec la belle Japonaise. Mettez les enfants au lit, baissez le son et tirez les rideaux.
Ça va être chaud… Plusieurs petits défauts du modèle original ont été corrigés. La position plus sportive m’a surpris par son confort, malgré la selle moyenne. La protection contre le vent est bonne. L’injection règle le problème de conduite saccadée qui était irritant sur le modèle précédant. Le moteur vibre moins et pousse encore plus fort qu’avant; les suspensions sont bien calibrées et la mélodie de l’échappement est une vraie drogue! À force de polir sa superstandard, Yamaha a toutefois enlevé à la FZ1 son côté délinquant et brutal, ce qui ne va pas très bien avec le reste du virage sportif qu’elle a pris, car la Yamaha laisse au passage une bonne partie des atouts de l’ancien modèle en mode tourisme et duo. C’est une excellente moto, mais elle conviendra à un plus petit nombre de personnes que sa devancière. Elle rendra heureux l’amateur de sportives douces et confortables, désireux de réduire son tarif d’assurances… À part la VFR de Honda, qui offre plus de caractère, mais moins de chevaux, peu de motos
peuvent prétendre réussir aussi bien dans cette niche du marché!
— Martin Nadeau
Une FZ1, c’est avant tout un moteur enivrant qui tire très fort passé les 6 500 tr/min. Il donne envie de hurler alors qu’on s’accroche au guidon et qu’on se cache tant bien que mal derrière le trop petit pare-brise. Cent cinquante poulains, c’est juste ce qu’il faut; plus, c’est trop ! À mon avis… Le rugissement en pleine accélération flatte l’oreille. La puissance à bas régime semble anémique en comparaison. La position de conduite est presque idéale ; la « Yam » gagnerait à offrir un peu plus de dégagement pour les jambes. Mais pourquoi l’avoir affublée d’une selle si inconfortable ? Et que dire de la suspension qui fait claquer des dents lorsque
l’état de la route se dégrade vraiment ? Si le constructeur voulait bien corriger ces petits défauts, sans toutefois faire de la FZ1 une moto de tourisme… j’en achèterais volontiers une.
— Ugo Levac
Par rapport à l’ancien modèle que j’avais essayé en 2001, la nouvelle FZ1 a un côté rebelle plus affirmé et procure des sensations fortes, à la façon d’une sportive pure et dure. Elle est aussi maniable qu’un vélomoteur, mais sa puissance impose le respect. Sous la marque des 6 000 tr/min, le moteur manque de caractère. Cependant, lorsque l’aiguille du compte-tour bondit et sprinte vers la zone rouge, la FZ1 réagit avec une accélération absolument féroce; si vous ne portez pas attention, vous devrez sauter sur les freins rapidement. Et ceux-ci sont hyperpuissants ! Ses lignes frôlent la perfection et attirent la curiosité. Un régal pour les yeux ! Au chapitre des critiques, notons une selle au confort spartiate et une suspension sèche. Avec quelques petits changements, cette moto pourrait devenir une référence comme routière sportive. Un coup de foudre instantané !
— Denis Vayer
Je me demande quel concepteur a décidé le premier que la position de pilotage idéale sur une moto supersport devait être similaire à celle d’une machine de Grand Prix 250… Nous associons dorénavant les hautes performances à des répliques de motos de course carénées à guidons bracelets; elles sont efficaces si la plus grande partie de vos activités se déroule sur un circuit bordé de vibreurs rouges et blancs. Une fois que vous aurez passé outre à cette idéologie stéréotypée, vous réaliserez que la Yamaha FZ1 est une moto supersport pure et dure dont l’ergonomie ne vous fera pas crouler de douleur avant le premier plein d’essence. Son moteur dérivé de la R1 est réglé à la baisse, juste assez pour rendre la puissance moins menaçante, tout en conservant suffisamment de chevaux à haut régime pour satisfaire les accros des forces G. Il est malheureux que la puissance à bas régime ne soit pas aussi grande que celle d’un bicylindre de cylindrée comparable. Cela aurait fait de la FZ1 une « super supersport » !
— Costa Mouzouris
La FZ1 et moi, c’est une véritable histoire d’amour. Depuis sa sortie en 2001, j’en ai essayé quatre, dont une avec laquelle j’ai passé l’été en 2001. Malgré son changement de personnalité, je suis retombé amoureux de la FZ1. Plus radicale que l’ancienne, elle reste néanmoins une moto très polyvalente. Proche de l’idéal, à mon avis. J’aime son look de roadster, ses performances de sportive, sa tenue de route irréprochable et sa position de conduite très naturelle. Le manque de couple à bas régime dénoté par certains ne me dérange pas. Après tout, on est aux commandes d’un multicylindre en ligne de classe ouverte hyperperformant, et il s’agit là d’un comportement « normal » avec ce type de configuration moteur. La baisse du confort me gêne nettement plus, par contre…
— Didier Constant